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La normalisation de la haine

La normalisation de la haine (info # 011610/11) [Analyse]

Par Guy Millière©Metula News Agency

 

J’ai publié, voici quelques mois, un livre que j’ai appelé Comme si se préparait une seconde shoah. J’ai écrit ce livre parce que je sentais monter dans l’atmosphère française des parfums très nauséabonds.

 

L’antisémitisme s’avoue désormais plus nettement que cela n’a été le cas depuis plusieurs décennies : les commentaires de nombreux articles de journaux, du Monde au Figaro, dès qu’il s’agit de la communauté juive, sont emplis de vindicte accusatrice. Ils accusent « les Juifs » de se considérer au-dessus des lois, d’exercer une police de la pensée, de demander des « avantages particuliers ». Lesquels ? Ce n’est pas dit.

 

Quand vient le moment de se souvenir de la Shoah et d’Auschwitz, il s’écrit de plus en plus souvent qu’il y en a assez de ressasser ce genre de souvenirs, et, qu’après tout, il y a bien d’autres crimes dont il faudrait se souvenir.

 

Dès qu’il s’agit d’Israël, la haine se donne libre cours. Les praticiens de la haine sont tellement imprégnés de leurs propres délires, et des délires de ceux qui les entourent, qu’ils ne se rendent même plus compte qu’ils sont des praticiens de la haine

 

Les Juifs français sont quasiment sommés de partager leur haine, sous peine d’être considérés comme suspects. Les gens qui, comme moi, ne sont pas juifs et défendent Israël sont considérés avec une extrême suspicion.

 

C’est dans ce contexte que peut émerger une émission comme celle consacrée au « dossier palestinien » par France 2, dans Un œil sur la planète.

 

Tous les reportages de cette émission étaient porteurs de mensonges et de falsifications de l’histoire ou des faits, strictement tous, à un degré tel que cela en devenait nauséabond.

 

Mais je suis prêt à parier que les journalistes qui ont réalisé l’émission ne s’en sont pas vraiment rendu compte en réalisant les reportages. Ils baignent dans les mensonges et les falsifications à un tel degré, et avec une telle intensité, que mensonges et falsifications sont devenus pour eux aussi naturels que l’air qu’ils respirent.

 

Les journalistes qui ont signé la pétition du Syndicat National des Journalistes pour « défendre » l’émission ont agi pour partie par corporatisme, et pour partie de bonne foi, je le parierais aussi. Ils sont certains qu’Israël est un pays détestable et répugnant, que les « Palestiniens » sont des opprimés vivant dans des conditions odieuses par la faute des Juifs israéliens.

 

Ils ont remplacé depuis longtemps, dans leur bibliothèque, les livres d’histoire du Proche-Orient par des livres de propagande, qu’ils prennent pour des livres d’histoire.

 

L’immense majorité des téléspectateurs qui ont vu l’émission ont trouvé, je n’en doute pas non plus, que c’était une émission tout à fait objective et très respectable.

 

Ce que je viens d’écrire n’excuse rien. Au contraire. C’est juste un constatterrible.

 

La haine d’Israël est désormais normale en France. L’irritation vis-à-vis des commémorations de la Shoah et d’Auschwitz est normale aussi. La colère à l’encontre des Juifs qui parlent d’antisémitisme est normale elle-même.

 

Ce genre de « normalité » est pathologique et alarmant.

 

C’est parce que détester les Juifs était devenu normal en Allemagne et dans d’autres contrées d’Europe, qu’Hitler a pu accéder au pouvoir, et qu’il y a eu la Shoah et Auschwitz. Nombre de nazis étaient des gens tout à fait normaux, qui, comme Adolf Eichmann à son procès, disaient qu’ils avaient simplement fait leur travail : ils avaient pu mitrailler et gazer des Juifs pendant la journée, puis rentrer le soir dîner paisiblement en famille.

 

Il y a, aujourd’hui en France, des gens qui, en se disant qu’ils font une bonne action, sont prêts à attaquer des magasins parce qu’ils vendent des produits israéliens, à interrompre des concerts parce que les artistes sont israéliens, à vouloir faire interdire la projection de films, parce qu’ils sont israéliens. Ils dorment tranquillement la nuit et n’ont aucun problème de conscience. Ils ne se rendent pas compte qu’ils sont, sur bien des points, semblables aux nazis d’il y a soixante-dix ans.

 

Il y a, en France, des journalistes qui écrivent sur Israël des articles dignes de ceux publiés sur les Juifs dans les journaux du Troisième Reich, et qui n’ont eux-mêmes aucun problème de conscience.

 

Au rythme où vont les choses, je crains que, dans quelques années, il n’y ait plus guère de Juifs en France. Ou alors seulement des Juifs qui seront discrets, très discrets, et humbles, très humbles.

 

D’ores et déjà, quand je me rends dans des centres culturels juifs, je ne peux faire autrement que remarquer les sas d’entrée, les stricts contrôles, la présence de la police à proximité. Il en va de même pour les synagogues et les écoles juives.

 

Peut aussi s’opérer l’effacement de soi et l’abandon de la culture juive et l’un et l’autre s’opèrent : quand je donne des conférences pour des organisations juives, ou quand je participe à des journées de formation, comme récemment pour le CRIF, à Lyon, je dois constater qu’il y a fort peu de jeunes gens. Et cela me laisse songeur.

 

C’est l’effacement de soi ou la volonté de conformisme qui fait que des journalistes juifs peuvent rejoindre la meute. En partageant la haine, ils cessent effectivement d’être suspects. Ils sont considérés comme des journalistes « normaux et honnêtes ». Ils finissent par ne plus voir eux-mêmes qu’ils sont dans la haine.

 

Dans les réunions « propalestiniennes », les organisateurs apprécient toujours d’avoir un conférencier juif : si un Juif déteste Israël, c’est qu’on peut détester Israël en étant tout à fait normal.

 

Je dois le dire : je pense qu’une majorité de Français aujourd’hui considéreraient la destruction d’Israël et l’extermination de ses habitants par des hordes islamiques comme quelque chose de tout à fait « normal » !

 

Cela ne se produira pas. Je sais que l’armée israélienne dispose d’une supériorité technologique. Je sais aussi que le peuple américain est au côté d’Israël, quand bien même les Etats-Unis sont affaiblis aujourd’hui par les conséquences lourdes d’une erreur commise en novembre 2008.

 

Mais le simple fait de me dire que la France en est là suffit à me donner la nausée, et à faire monter en moi un sentiment intense de révolte et de dégoût.

 

Que devient ce pays ? Que devient ce peuple ?

 

Les quatre millions d’exemplaires vendus de la bouillie sénile et antisémite signée Stéphane Hessel, le vieillard indigne, apportent un peu la réponse.

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