Israël réunit la 4° communauté marocaine à l’étranger
Par Julie Chaudier
Après les MRE de France, d’Espagne et d’Italie, viennent, en nombre, les MRE d’Israël. Quatrième, voire troisième communauté marocaine du monde, ils sont souvent oubliés des recherches marocaines sur les MRE, alors que nombre d’entre eux cultivent leur marocanité en Israël.
Par nationalité, les Marocains résidant en Israël forment la quatrième communauté MRE du monde, derrière la France, l’Espagne et l’Italie, mais devant la Belgique et les Pays-Bas. Rendue clairement visible par une infographie interactive « World Map of Migration 2010 », l’ampleur de la communauté marocaine en Israël est souvent oubliée. Les Marocains d’Israël étaient plus de 245 000 en 2010, selon les statistiques de la Banque mondiale. Ils ne se rappellent guère au souvenir des Marocains du Maroc qu’au printemps lorsque plusieurs milliers d’entre eux réalisent un pèlerinage sur la tombe de leurs saints.
La communauté juive marocaine a célébré, dimanche 28 avril au village d’Aït Bayyoud, dans la province d’Essaouira, le moussem annuel du Rabbi Nessim Ben Nessim, marqué par la participation de centaines de pèlerins juifs du Maroc et de l’étranger », rapporte le Matin du Sahara. « Ces cultes populaires juifs présentent d’évidente analogie avec les cultes maraboutiques du Maroc », écrit Hassan Majd en introduction de sa thèse « Le culte des saints et les pèlerinages des Juifs du Maroc ».
Aucune étude sur les MRE d'Israël
L’analogie s’arrête là parce qu’au Maroc, cette communauté marocaine, un peu particulière, a été beaucoup ocultée. La Fondation Hassan II, par exemple, qui a publié différentes études concernant les Marocains du monde, fait totalement l’impasse sur les Marocains d’Israël. Dans une très vaste étude intitulée « Marocains de l’extérieurs », publiée en 2007, la majorité des pays de résidence des Marocains sont étudiés, mais la 4° communauté du monde est totalement oubliée.
Il n’existe pas de travaux de la fondation sur ces questions là, reconnait Abderrahmane Zahi, secrétaire général de la Fondation Hassan II. « Dans la mesure où nous n’avons pas encore épuisé l’étude de toutes les zones de résidence des Marocains dans le monde, nous ne nous pencherons pas sur les Marocains d’Israël, reconnaît-il. Quand il y aura moins d’allergie autour de cette question, nous pourrons l’envisager. » La question de la réalisation concrète d’une éventuelle étude se pose également, selon M. Zahi. « Nous n’avons pas de statistiques publiables, est-ce que l’on pourrait mener une étude dans des conditions scientifiques satisfaisantes là-bas alors que tous ceux qui veulent entrer ont des problèmes ? », s’interroge-t-il.
800 000 Israéliens d'origine marocaine
Pourtant, « de nos jours, on estime que 800 000 Israéliens sont originaires du Maroc sur une population totale d’environ 6,2 millions d’individus [soit 12,9% de la population israélienne] . Selon le bureau de la statistique 156 500 personnes sont nées au Maroc, 336 000 sont nées en Israël d’un ou de deux parents marocains, le reste formant la troisième génération », indique, Emanuela Trevisan Semi, professeure d’études juives contemporaines à l’Université Ca’ Foscari de Venise dans le magazine a contrario, en 2007.
« Chaque année, depuis la signature des accords d’Oslo, de 15 000 à 20 000 Israéliens d’origine marocaine visitent le Maroc : beaucoup d’entre eux possèdent un passeport marocain, les autres ont un laissez-passer. Le voyage, pour ceux qui ont quitté le Maroc bien des années auparavant, constitue un événement complexe qui met en jeu processus identitaires et sentiments d’appartenance », explique Emanuela Trevisan Semi.
Les liens avec le Maroc de ces centaines de milliers d’individus ne s’arrêtent pas à ce pélerinage. Ils vouent également une profonde admiration pour le roi du Maroc. « […] c’est à partir de 2000 que l’on a vu l’espace israélien se couvrir de lieux de mémoire marocains, officialisés par les maires et « sacralisés » par les bénédictions particulières des grands rabbins locaux (les uns et les autres étant d’origine marocaine). On a ainsi inauguré une rue Hassan II à Kyriat Ekron (près de Rehovot), un parc à Bet Shemesh, une place à Sderot dans le nord du Neguev, une place à Petah Tiqva, un parc à Ashdod (où sur les 200 000 habitants, 70 000 sont originaires du Maroc), une promenade à Kyriat Gat (51 000 habitants dont 25 000 originaires du Maroc). On a émis un timbre commémoratif, produit un film sur le roi, donné diverses soirées à sa mémoire, et un livre d’or a recueilli les noms des donateurs », détaille la chercheuse.