Au Crif, Sarkozy salue un début de printemps des peuples arabes
Nicolas Sarkozy a jugé "positif" le mouvement enclenché dans le monde arabe par les manifestations de Tunisie et d'Egypte et jugé du devoir des démocraties de soutenir ce "début de printemps des peuples".
Le président français était l'invité d'honneur du traditionnel dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), où se pressait mercredi soir le gotha de la classe politique française, aux portes de Paris.
Après s'être laissé surprendre par la "révolution de jasmin" qui a fait chuter le président tunisien Zine ben Ali le 14 janvier, le gouvernement français s'efforce de coller à la vague qui ébranle aujourd'hui le régime de Hosni Moubarak en Egypte.
Les événements de Tunisie et d'Egypte, qui ont envoyé une onde de choc dans le reste du monde arabe, ont "une dimension sans doute historique", a déclaré Nicolas Sarkozy.
"Le peuple tunisien et le peuple égyptien, avec une audace qui les a surpris eux-mêmes, ont dit avec force qu'ils voulaient vivre autrement", a-t-il estimé. "Nul n'a le droit de les condamner pour ce qu'ils ont eu le courage de dire."
"Ce début d'un printemps des peuples est positif parce qu'il est authentique", a poursuivi le chef de l'Etat.
Il a salué le fait que les manifestants tunisiens et égyptiens n'aient pas crié "à bas l'Occident", "à bas l'Amérique" ou "à bas l'Israël", ni attaqué une minorité ou prôné un retour à un âge d'or islamique.
Nicolas Sarkozy a cependant lancé une mise en garde contre la tentation d'en tirer des conclusions trop hâtives.
"Qui peut dire quelles seront les étapes à venir ? Nous avons eu déjà tant de mal à distinguer les étapes récentes", a-t-il expliqué. "Et qui peut exclure des dérives brutales ou totalitaires ? Personne."
"Mais c'est notre devoir d'aider ces mouvements. Ce qui ne veut pas dire nous ingérer", a-t-il néanmoins ajouté. "Car ce sont nos valeurs dont ces peuples se réclament (...) Pourquoi ce qui est bon pour nous leur serait interdit ?"
LE CRIF "VIGILANT"
Nicolas Sarkozy a estimé que c'était aussi l'intérêt des démocraties occidentales et d'Israël, dont la sécurité ne sera selon lui que mieux garantie s'il a à ses frontières des Etats démocratiques et des peuples libres, "qui n'auraient pas à chercher ailleurs la compensation de leur propre frustration".
Le président du Crif avait lui-même salué auparavant les mouvements pro-démocratie qui agitent les pays arabes. Mais il avait invité à la vigilance et lancé une mise en garde contre le "fanatisme islamiste".
"Une révolution sans précédent soulève divers pays arabes. Elle est portée par une aspiration démocratique évidente, qui suscite notre admiration", a déclaré Richard Prasquier.
"Mais sous l'étendard de la démocratie et de la liberté se camouflent des gens qui cherchent à détruire la liberté et la démocratie", a ajouté le président du Crif. "C'est le cas des Frères Musulmans (qui) peuvent provoquer le retour d'une rhétorique de guerre contre Israël. Nous sommes admiratifs mais nous sommes vigilants."
Il a dénoncé dans le Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, soumise à un blocus d'Israël, "un mouvement islamiste, totalitariste et terroriste".
Nicolas Sarkozy a pour sa part réaffirmé que seule la création d'un Etat palestinien démocratique, viable et souverain au côté d'Israël garantirait sa sécurité.
Il s'est dit convaincu "qu'une reprise des négociations directes (entre Israéliens et Palestiniens) serait un signal supplémentaire d'espoir pour tous les peuples de la région".
Il a par ailleurs adressé un signe aux juifs de France, visés en 2010 par 466 actes antisémites, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur.
"Le judaïsme a contribué à forger l'identité de la France", a-t-il dit. "Si la France a des racines chrétiennes (elle) a aussi des racines juives (...) et chaque français, quelle que soit sa confession ou son origine, peut en être fier."
Emmanuel Jarry, édité par Jean-Stéphane Brosse