« BHL: le révélateur de salauds! », par Mohamed Sifaoui
sur le Huffington Post
B.H.L ! Décidément, voilà trois lettres, des initiales, qui ne laissent pas indifférents. Par sa seule apparition quelque part, Bernard-Henri Lévy fait naître, chez certains, les réactions les plus folles. Les plus détestables aussi. Il ne provoque pas chez eux le débat, la dispute intellectuelle ou la polémique. Ce qui serait normal pour tout personnage public soumis à la critique. Non BHL, suscite plus que cela. Il suscite la haine.
L’exemple en a été donné, ce week-end encore, par quelques excités tunisiens, immatures politiquement, emportés par une culture militante post-révolutionnaire, mêlant délires paranoïaques, sentiments anti-israéliens, relents antisémites, pulsions anti-occidentales, repli sur soi, peur de l’étranger, médiocrité politique et l’assurance de l’enfant gâté convaincu que le symbole « Dégage ! » peut désormais être brandi, de manière brouillonne, aussi bien, devant le dictateur qu’en face du démocrate. Certains tunisiens ont trouvé désormais un « joujou » qu’ils dégainent indistinctement à la face de l’ennemi et de l’adversaire et à la face de l’ami et de l’allié.
Le « Dégage ! », c’est un peu la télécommande d’une rue qui bouillonne. Et cette fameuse pancarte est désormais accessible à tout un chacun. À la portée du révolutionnaire structuré et politisé et à la portée du tout-venant frustré probablement de ne pas avoir eu le courage d’être là quand la vraie révolution fauchait des vies humaines dans les faubourgs de Tunis et dans les rues de Sidi Bouzid. Et le frustré prend aujourd’hui son courage à deux mains pour aller dire « Dégage ! » à un ami des démocrates tunisiens ou alors il se penche sur son clavier pour écrire la bêtise et décrire « l’odieux personnage » qu’est à ses yeux BHL.
L’Histoire nous enseigne que les périodes post-révolutionnaires sont à la fois les moins intelligentes et les plus meurtrières. Elles surviennent toujours avec leur lot de cadavres, leur barnum d’idéologies qui se complètent, s’affrontent ou s’annulent et leur chahut. Les périodes post-révolutionnaires permettent aussi aux opposants et autres résistants de la 25e heure de connaître leur heure de gloire et, dans le cas tunisien, de faire sortir du bois, tous ceux qui furent émasculés, déviriliser et dévitaliser par 60 années de bourguibisme et de benaalisme. Ceux qui ont attendu qu’un jeune homme paye de sa vie, à Sidi Bouzid, pour qu’ils puissent, eux, écrire librement sur les réseaux sociaux ; ceux qui ont attendu que des femmes et des hommes offrent leur corps à la mitraille. Ceux enfin qui se sont réveillés après le départ du dictateur et qui tentent aujourd’hui de crier très fort pour exister, sont ceux qui, à Tunis, ont créé, de toutes pièces, à partir de bric et de broc paranoïaque, une histoire n’ayant ni queue ni tête. Ils ont prétendu que « BHL avait rendez-vous avec des terroristes libyens pour déstabiliser la Tunisie ». C’est pathologique ou quasi…
Mais avant d’essayer d’analyser ces comportements, revenons aux faits et aux raisons, objectives et subjectives, qui me poussent à témoigner à BHL tout mon soutien devant cette déferlante de haine.
Bernard-Henri Lévy qu’on l’aime ou pas, que l’on soit d’accord avec son mode d’action ou pas, qu’on partage ses opinions ou pas, est un intellectuel qui n’a jamais caché ses engagements. Il intervient à visage découvert sur des sujets brûlants et donc, tout naturellement, il ne peut que créer la controverse. À mon modeste niveau, j’en sais quelque chose.
Il est vrai que le personnage, contrairement à certains intellectuels de salons, n’a pas choisi la facilité. Il s’expose. Il est de ceux qui mouillent la chemise. Ah ! La fameuse chemise.
Quand j’ai commencé à connaître BHL – et c’est de là, soyons honnête, que vient l’amitié que je lui porte – il venait de prendre position sur la guerre civile en Algérie. Celle qui avait fait, rappelons-le, 200 000 morts durant les années 1990.
À l’époque, le terrorisme islamiste ne menaçait pas de manière directe la stabilité des capitales occidentales. C’était, pensait-on, un problème endogène au monde arabo-musulman. Et il était, par ailleurs, de bon ton d’accueillir les leaders islamistes qui n’avaient alors aucun mal à trouver refuge sinon en Amérique du nord, dans plusieurs villes du Vieux-continent. Que ce soit à Londres ou à Paris en passant par Bruxelles, les chefs terroristes utilisaient plusieurs capitales européennes, avec la complaisance de certains milieux politico-médiatiques, comme bases arrières de leurs opérations terroristes perpétrées en Algérie, voire plus tard ailleurs.
Bernard-Henri Lévy (avec André Glucksmann) et quelques rares intellectuels, avaient osé, à l’époque, s’inscrire à contre-sens de la doxa et avaient soutenu alors l’État algérien (je dis bien l’État et non pas le pouvoir corrompu et corrupteur) et, singulièrement les démocrates. D’autant que ces derniers étaient assassinés quasi quotidiennement par les hordes barbares du GIA dans l’indifférence quasi générale.
Cette prise de position lui valut déjà les pires injures et les accusations les plus viles. Le manichéisme qui caractérise certains milieux français et la passion que suscite BHL ont amené certains esprits à lancer en sa direction des accusations (déjà !) qui pouvaient sous-entendre qu’outre une collusion avec un régime détestable, celui d’Alger, le philosophe se serait fait grassement payer pour « dédouaner les militaires algériens ».
Déjà la rumeur ! Déjà la calomnie ! Et déjà le mensonge pour salir un homme, un intellectuel, qui a commis la faute de dire publiquement que les islamistes algériens, que ces intégristes égorgeurs de femmes et d’enfants, étaient des barbares…
Lui, le juif, décrit aujourd’hui par ces quelques tunisiens excités, comme étant « l’ennemi du monde arabe », avait osé prendre la défense de démocrates algériens. Lui, le juif, décrit aujourd’hui comme un « agent du sionisme », avait remué ciel et terre pour venir en aide aux Bosniaques. Quels crimes !
Oui quels crimes ! En l’espace de quelques années, le voilà soutenant tour à tour, musulmans bosniaques et démocrates algériens.
À l’époque, mais cela est valable aujourd’hui encore, les démocrates arabes et/ou maghrébins et/ou musulmans n’existent pas sur les radars du microcosme parisien. Il y aurait les dictateurs et les islamistes. Et entre les deux, il fallait soit choisir entre les uns et les autres, soit adopter une attitude de neutralité. Posture qui permettait de suivre insensible les meurtres et décapitations perpétrés par les islamistes ou les exactions commises par les militaires. BHL, comme à son habitude, n’avait pas choisi cette si confortable facilité. Contrairement à beaucoup d’autres intellectuels, il n’a pas choisi la lâcheté ni cette odieuse et indécente position, très à la mode alors, qui consistait à blanchir les islamistes de leurs crimes et à les faire passer pour des gens respectables.
Voilà pourquoi je témoigne du respect à cet homme !
Oui certains pourraient me rétorquer que sa dégaine, que cette coiffure qui insupporte tant, que cette chemise déboutonnée, sont autant de faits graves qui suffiraient à faire de l’intellectuel un être si détestable ne méritant ni notre soutien ni notre solidarité quand bien même il aurait mené des combats louables. Et qu’après tout, les chiens et les loups ont décidé que l’homme était un salaud et qu’il fallait, parce que les chiens et les loups l’ont décidé, l’envoyer sur l’échafaud des médias et des réseaux sociaux.
Le problème c’est que je n’aime ni les chiens ni les loups surtout ceux qui lancent ces hurlements acariâtres qui nous créent ce climat si malsain.
Ceci pour la nécessaire clarification quant au soutien que je ne cesserai de lui apporter.
Mais revenons à son escapade tunisienne. Quoi qu’en puisse en dire ou en penser et, au delà de la folie furieuse que peut susciter le philosophe, BHL a participé activement à la prise de conscience internationale qui a permis notamment le sauvetage de dizaines de milliers de civils de Benghazi, promis au massacre par l’entreprise meurtrière des Kadhafi père et fils.
Du haut de notre confort parisien, certains pourraient croire qu’assister des « arabo-musulmans » vivant dans des contrées lointaines ne représente nullement une priorité. D’autres encore lisent l’histoire tel un événement d’actualité et ignorent que le destin des nations qui avancent est aussi fait de larmes et de sang.
Ou encore, diront-ils, BHL n’étant ni un diplomate ni un ambassadeur encore moins un élu, il n’aurait aucune légitimité à s’ingérer dans les affaires de la géo-politique. Certes, BHL n’a aucun mandat électif. Et il n’a, à ma connaissance, jamais prétendu détenir une telle légitimité. Mais quoi qu’en pensent ses détracteurs, BHL s’est inscrit dans une vieille tradition qui a incité, avant lui, des intellectuels et des philosophes, de Voltaire à Camus, en passant par Sartre à s’immiscer dans la chose politique. Dans l’affaire libyenne, quoi qu’on puisse en baver ici et là, BHL était dans son rôle de lanceur d’alerte. Et il devrait même être décoré pour avoir assister un peuple en danger.
Tous ses détracteurs, soyons convaincus, auraient joué aux vierges effarouchées, auraient crié au scandale et auraient dénoncé la non-ingérence si l’ancien dictateur libyen avait réussi à massacrer Benghazi. On connaît les effets de manche que lancent toujours a posteriori les lâches et tous ceux qui ne prennent jamais de risques pour leur image.
En fait, on ne pardonne pas à BHL d’avoir participé au sauvetage de vies humaines. Que penser d’autre ? Car, dans tous les « arguments » avancés par ses détracteurs, il n’y a aucune idée construite et rationnelle. Il y a de la haine ! On doit critiquer BHL, parce que c’est comme ça ! Si dans le lot, certains se nourrissent d’idéologies douteuses pour essayer de le descendre, d’autres imbéciles ne savent même pas pourquoi ils le critiquent. Ou alors, dans le meilleur des cas, ils croient savoir… La plupart, au lieu de le lire préfèrent répéter tels des perroquets (ou des oiseaux de mauvaise augure) ce qu’ils ont entendu ailleurs. Et ceux qui l’ont lu, en partie, vous diront qu’il a commis une erreur dans un livre ou qu’il y aurait une coquille dans un autre et que, par conséquent, cela suffirait à l’emmener au bûcher. C’est effrayant, car la méthode rappelle l’Église catholique du moyen-âge.
Aussi BHL s’est rendu en Tunisie pour y rencontrer certains de ses amis libyens. Rien ne l’empêchait de le faire. Quel crime aurait commis un intellectuel français qui décide de rencontrer des dignitaires libyens – la Libye étant un sujet sur lequel il reste engagé – dans un hôtel très fliqué à Tunis, au vu et au su de tous ? Certains Tunisiens y ont vu une tentative de déstabilisation. Ô bien fragile cette Tunisie qui serait « déstabilisée » par BHL, son ami, le réalisateur Gilles Hertzog et quelques libyens totalement fréquentables. Bien fragile cette Tunisie qui a peur d’un philosophe qui, soi-dit en passant, n’a jamais tenu le moindre propos désagréable à l’endroit des révolutionnaires appelant au contraire à les soutenir. Si le pays de la « révolution du Jasmin » peut être déstabilisé par BHL autant rappeler Ben Ali à la rescousse ou alors mieux, mettre immédiatement la Tunisie sous protectorat et désigner un gouverneur militaire. Voyons, voyons ! Soyons sérieux !
La vérité est ailleurs.
Au delà du cas BHL, il y a un aspect que l’on devrait soulever, car une vraie révolution, c’est celle qui serait capable de faire évoluer les mentalités et bousculer les dogmatismes, y compris d’inspiration religieuse…
Sur les réseaux sociaux ou dans la presse tunisienne, presque systématiquement, l’identité juive et/ou l’idéologie sioniste de BHL sont mentionnées comme si, dans chaque capitale arabe, chaque analyse politique, chaque grille de lecture, d’un événement qu’il soit anodin ou grave, devrait considérer que le sionisme et/ou la judéité seraient de facto, l’alpha et l’oméga de toute réflexion structurée…
Il est évident que la réaction contre BHL est aussi, au delà des contradictions internes liées à la société tunisienne, et au-delà de l’immaturité politique, le résultat de 60 ans de propagande antisioniste délivrée par les nationalismes arabes et plusieurs décennies d’endoctrinement antisémite favorisées par des théories sinon islamiste ou wahhabite, islamo-nationalistes.
Toutes ces pensées, nous le savons, ont entretenu la thèse (pour ne pas dire le poncif) du juif/sioniste comploteur, puissant, ainsi désigné, ennemi traditionnel de la société arabo-musulmane. En l’espèce, il est symbolisé ici par le « maudit » BHL.
En effet, la fébrilité de la société civile tunisienne, qui est aussi celle de toutes les sociétés arabes, cache mal ces aspects. Certains intellectuels maghrébins auront du mal à l’avouer, car il s’agit d’un tabou que l’on ne reconnaît pas publiquement : les sociétés arabo-musulmanes sont largement travaillées par plusieurs types de pensées antisémites qui se rejoignent toutes. Même si l’idéologie antisémite n’est pas vraiment structurée dans une réflexion fasciste, elle est néanmoins culturellement présentes dans certaines couches. Même en Tunisie ! Cette Tunisie dite tolérante et accueillante fut, elle aussi, malgré les hypocrisies, sujette à la propagande antisémite. L’arabe et le musulman ne sont pas génétiquement antisémites, ils sont endoctrinés à l’antisémitisme.
En réalité, cette réaction contre l’intellectuel français, encore une fois, dépasse le cas BHL à travers sa personnalité et ses engagements.
Elle illustre à la fois les complexes d’une société (arabe) très peu sûre d’elle même qui trouve en BHL la victime expiatoire idéale à même de cimenter la communauté nationale. On aura ainsi vu qu’un juif sioniste, lors d’un week-end passé à Tunis, aura réussi à rapprocher plusieurs points de vue, parfois divergents. Cela est visible notamment sur les réseaux sociaux.
Cette affaire aurait pu prêter à sourire si l’idéologie sous-jacente n’était pas de nature évidemment contre-révolutionnaire, car le principe de l’ennemi extérieur (symbolisé ici par BHL mais demain ce sera quelqu’un d’autre) est le propre des régimes antidémocratiques qui tentent, de cette manière, de se légitimer et de faire oublier leurs carences. Et Les mêmes, ceux qui voient en BHL le symbole de « l’ennemi extérieur », devront compléter leur œuvre en désignant demain « l’ennemi intérieur », s’il n’est pas déjà désigné. Celui-ci, sera tunisien et sera décrit comme « traître », « félon », « suppôt de l’étranger », voire des juifs ou des israéliens. La rhétorique habituelle. Celle qui a permis, jusqu’à présent, à tous les régimes arabes de pérenniser leur pouvoir en se reposant sur cette escroquerie.
Si cet incident cache ce qui précède, ce serait vraiment dommageable (voire catastrophique) pour la « révolution de Jasmin » qui aurait ainsi enfanté quelque chose de rance.
Quel dommage de voir « Nida Tounès », (l’appel de la Tunisie), le mouvement qui vient de battre les islamistes, lors des dernières élections, construire ou entretenir une idéologie islamo-nationaliste. Ce serait en réalité du benaalisme sans Ben Ali. Car attention, contrairement à tous ceux qui exultent, un mouvement n’est pas respectable parce qu’il bat électoralement des islamistes. Un mouvement politique devient réellement fréquentable que s’il dégage une pensée attachée aux valeurs universelles et, dans le cas tunisien, que s’il arrive à rompre avec les pratiques du passé et à s’empêcher de recycler les rebuts du bennalisme. Ce n’est pas vraiment le cas de Nida Tounès pour l’instant.
Mais détrompons nous, cette haine qui se déverse contre BHL à travers les sites web et les réseaux sociaux, n’émane pas d’anonymes frustrés uniquement, mais aussi et surtout de personnages publics aigris qui ont fait de la haine de BHL, un art de vivre.
Apprécions plutôt…
L’islamiste Tariq Ramadan, héritier de la pensée des Frères musulmans, se fend d’un message pour féliciter les Tunisiens d’avoir chassé BHL « agent d’Israël » et « agent du Mossad » (Rien que cela !). Evidemment dès que l’occasion se présente, les adeptes de la pensée de Hassan al Banna ne peuvent s’empêcher de rappeler à Bernard-Henri Lévy sa judéité tout en lui déniant son statut d’intellectuel ou de philosophe pour lui octroyer un autre, celui « d’agent ». Dans ce terme, il y a l’édification d’une image trouble qui ne peut que convenir à l’idée sous-jacente, celle du « juif comploteur ».
Parce que dans la galaxie de Tariq Ramadan, l’on peut s’honorer de soutenir les tueurs fanatisés du Hamas qui appellent à la destruction de l’État d’Israël, et, dans un même couplet morbide, descendre en flammes, le « sioniste » qui, depuis plusieurs années, défend, s’agissant du conflit israélo-palestinien, le principe de « deux peuples, deux États ».
Pour Tariq Ramadan (quoi d’étonnant de la part d’un islamiste ?) le tueur du juif est beaucoup plus respectable que l’ami des libyens, du peuple de Benghazi et des démocrates algériens.
Mais Ramadan, n’est pas isolé. On pourrait se dire qu’un coutumier du fait comme lui serait, après tout, dans son rôle d’islamiste en lançant pareille fatwa. Car c’en est une, soi-dit en passant. Présenter BHL comme un « agent du Mossad » et non pas comme un intellectuel, c’est lui octroyer, en ces temps de tensions, le statut du soldat qu’il serait légitime d’atteindre. Évidemment ! Si Ramadan qui n’ignore rien de son audience auprès de certaines personnes perméables à la violence, il sait qu’en décrivant BHL de la sorte, il le désigne comme cible à tout aspirant terroriste. « Voilà l’agent du Mossad, faites-en bon usage ! » N’est-ce pas là ce qu’il semble suggérer ?
Pascal Boniface qui, en « spécialiste » autoproclamé en beaucoup de choses, vous ferait aussi bien un cours de cuisine qu’une leçon théorique de football, entre deux « approximations » géopolitiques, est devenu, à la longue, un spécialiste es-diabolisation de l’autre. Il ne pouvait donc qu’emboîter le pas à l’intégriste Ramadan avec lequel il semble entretenir d’ailleurs des relations cordiales. Comment pouvait-il faire autrement, lui, « l’ami déclaré des arabes et des musulmans », qui viendra, toute honte bue, affirmer publiquement que BHL, ma modeste personne et tant d’autres intellectuels ou journalistes, serions des « faussaires » alors qu’Éric Zemmour, désormais chantre assumé des courants d’extrême-droite, pourfendeur de l’immigration et de tous les allogènes, réels ou supposés, est présenté par Boniface, cet adepte des méthodes inquisitoires, comme un « intellectuel respectable » ?
Eric Zemmour, le diffamateur des musulmans, déjà condamné pour racisme, « intellectuel respectable » et Bernard-Henri Lévy, le seul intellectuel à avoir crier pour que le peuple de Benghazi soit sauvé, « intellectuel faussaire ». Cherchez l’incohérence ! Non Boniface n’est pas antisémite. C’est lui qui le dit. D’ailleurs, il apprécie Zemmour. Donc ! Honni soit qui mal y pense. Boniface serait juste « antisioniste ». Tout comme Dieudionné dont les adeptes, tout comme ceux de Boniface, saluent les « courageux tunisiens » qui ont vaillamment barré la route à BHL. Idem pour Alain Soral, le trublion de l’extrême droite, qui agit notamment sur Internet. Là aussi BHL a réussi à réunir ce beau monde, mais surtout à faire tomber les masques… de clowns.
Aussi, sur sa page Facebook, Pascal Boniface se réjouit de la « fessée » reçue par BHL à Tunis.
Le commentaire pourrait prêter à sourire, par son côté puéril, à l’image de son auteur, s’il n’était pas destiné à galvaniser la troupe « antisioniste » et à exciter la horde antisémite. Et pour cause, les chiens étant lâchés, on peut, dès lors, lire sur la page de Boniface les plus grandes analyses de géopolitique qui réduisent en miettes l’action de BHL, son œuvre et toute sa carrière. Et comment !
Apprécions plutôt…
L’intellectuel français est décrit, par un des membres du fan-club de Boniface, comme un « rat assoiffé de sang ». Apparemment, aveuglé par la haine qu’il voue au philosophe, le même Boniface ne semble pas dérangé par ces commentaires qui reprennent, sans aucun problème et comme si de rien n’était, la sémantique classique de la pensée antisémite. Le vieux Pascal semble dépassé. Lui qui ne veut surtout pas passer pour un vulgaire antisémite, mais seulement pour un respectable « antisioniste », compte bel et bien parmi ses supporters quelques antisémites. Mais il vous dira, ce n’est pas moi…
Le « rat », le « sang » : voilà pourtant deux éléments consubstantiels aux discours antisémites, utilisé sur le mur d’un personnage public, sans que celui-ci ne s’en émeuve, réagisse ou supprime cette parole haineuse.
Un deuxième exemple est tout aussi symptomatique. Un autre « ami » virtuel de Pascal Boniface ira plus loin. Il dit espérer que BHL, au moment où celui-ci s’apprêtait à quitter la Tunisie, ne puisse pas aller jusqu’à l’aéroport. « La Tunisie nous rendrait un grand service ! », s’exclamera-t-il.
Rien d’autre qu’un appel au meurtre légèrement déguisé. Et au même fan de Boniface de justifier son appel dans le commentaire suivant : « pour [que] cet assassin [BHL] ne nuise plus à personne ». On ne peut plus clair ? Non ?
Mais ne vous inquiétez pas. Demain ou le jour suivant, Tariq Ramadan et Pascal Boniface (et d’autres) iront sur un plateau de télévision pour dénoncer tous les extrémistes… Nous les croyons déjà sur parole.
http://www.huffingtonpost.fr/mohamed-sifaoui/antisemitisme-bhl-tunisie_b_6098696.html
Mohamed Sifaoui, Journaliste, écrivain et réalisateur.
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