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Il était une fois l’Andalousie

 

Il était une fois l’Andalousie

 

 

Côté jardin, l’Andalousie a été la terre du savoir-vivre, de l’élégance et du rayonnement culturel et politique musulman. Côté cour, la péninsule a été, huit siècles durant, le théâtre de luttes acharnées pour le pouvoir. Que reste-t-il de cette histoire ? Quel rôle ont joué les rois marocains dans la conquête puis la chute d’Al-Andalus ?

Que reste-t-il de l’Andalousie ? Comment expliquer la fascination qu’exerce (encore aujourd’hui) cette partie du monde sur plusieurs millions d’Arabes et de musulmans, partout dans le monde ? “Dans l’imaginaire collectif, l’Andalousie représente l’une des dernières fiertés arabo-musulmanes. Ce mot renvoie à une époque, aujourd’hui évoquée avec nostalgie et qui était synonyme de grandeur, de puissance, d’opulence et de rayonnement politique et culturel musulman”, analyse l’historien libanais Ibrahim Baydoun dans son ouvrage L’Etat arabo-musulman en Andalousie. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs, si depuis septembre 2001, l’Andalousie est fréquemment citée dans les messages de plusieurs groupes terroristes dont Al Qaïda, qui surfe sur les gloires d’antan et qui tente, à sa manière, de les ressusciter.

Au Maroc, l’attachement à cette terre voisine est encore plus fort, plus complexe. Depuis juillet, la culture andalouse est citée, dans la Constitution, comme un affluent de l’identité marocaine plurielle aux côtés des af­fluents africain, hébraïque et méditerranéen. Dans la vie de tous les jours, la présence de cette culture est également très visible à travers la musique, la cuisine ou l’architecture. Mieux, plusieurs grandes familles marocaines (des leaders politiques ou des capitaines d’industrie) se revendiquent encore de cette descendance andalouse. Et cela est plutôt normal. Du fait de sa position géographique, le Maroc a naturellement accueilli plusieurs familles andalouses ayant fui la persécution des Rois catholiques à partir de 1492. Car au-delà du faste et du rayonnement d’antan, l’Andalousie c’est également l’histoire d’une plaie restée ouverte. Une humiliation subie par des dizaines de milliers de Morisques chassés sans ménagement de leur terre, et qui a inspiré de grands poètes de l’époque ainsi que des contemporains comme Mahmoud Darwich. L’Andalousie, c’est en fait l’histoire d’une parenthèse ouverte par un conquérant amazigh, Tarik Ibn Ziad en 711 et qui se referme, huit siècles plus tard, par la chute de Grenade le 2 janvier 1492. Flashback.

 

Tarik Ibn Ziad, ce conquérant !

Nous sommes en l’an 681. L’islam, révélé près d’un siècle plus tôt au prophète Mohammed, frappe aux portes du Maroc sous la conduite des Omeyyades. Les habitants d’Al Maghrib, berbères dans leur majorité, se convertissent au fur et à mesure à cette nouvelle religion. A l’époque, le Maroc est alors considéré comme le bout du monde puisque l’Amérique n’a pas encore été découverte. Naturellement donc, les dynasties qui finissent par asseoir leur autorité sur le royaume regardent vers le Nord. Les conquérants musulmans lorgnent la péninsule qui pointe à quelques kilomètres seulement au large de la ville de Tanger. Le territoire voisin est contrôlé par les Wisigoths, des migrants allemands ayant survécu à la chute de l’empire romain. L’Andalousie semble être une proie facile. Les Wisigoths ne font pas l’unanimité auprès de la population, qui croule sous le poids des impôts imposés par une oligarchie régnante. La conquête est confiée à un certain Tarik Ibn Ziad, wali des Omeyyades à Tanger. L’homme est connu pour être un vaillant guerrier amazigh, doublé d’un redoutable stratège. Il sait qu’il tient la chance de sa vie et commence par envoyer, dès 710, un éclaireur arabe du nom de Tarif Ibn Malik Maafiri (qui donnera son nom à la ville de Tarifa) pour étudier le terrain et fédérer, autour des armées musulmanes, les ennemis du roi wisigoth. La mission est un succès. En avril 711, Tarik Ibn Ziad lance l’assaut final depuis la ville de Sebta. Il est soutenu par le gouverneur wisigoth local, Don Julian, resté à ce jour symbole de trahison et de compromission dans la culture espagnole. C’est d’ailleurs lui qui recommande à Tarik Ibn Zyad de débarquer ses troupes au niveau d’un rocher, Gibraltar, qui portera son nom pour l’éternité. Et c’est justement sur ce rocher que le vaillant combattant amazigh aurait prononcé son fameux discours enjoignant ses troupes à affronter sans peur l’ennemi d’en face, et de ne pas battre en retraite. Tarik aurait même brûlé les bateaux de son armée pour obliger ses 12 000 soldats à se battre jusqu’au bout. Mythe ou réalité ? Difficile de trancher. Plusieurs historiens restent sceptiques. “Un discours a certes été prononcé, mais a-t-il été aussi éloquent ? Peut-être pas vu que Tarik Ibn Ziad a appris la langue arabe sur le tas. Des historiens arabes ont certainement dû retoucher le texte et le magnifier afin de perpétuer le mythe”, analyse le spécialiste de l’histoire de l’islam, Abdelhalim Aouiss,  dans  l’un de ses ouvrages, dédié à l’Andalousie.  Et cela a bien marché. Aujourd’hui encore, le discours du conquérant amazigh est enseigné dans les écoles comme un acte fondateur de la conquête arabo-musulmane de l’Andalousie. Cette dernière s’est d’ailleurs faite presque sans résistance, permettant aux armées musulmanes d’atteindre Tolède, capitale des Wisigoths, quelques mois seulement après le débarquement au rocher de Gibraltar. Tarik Ibn Ziad est alors en contact permanent avec Moussa Ibn Noussaïr, gouverneur ommeyyade d’Ifriquia (actuelle Tunisie), et qui dirige une sorte de conseil de guerre qui suit de près la mission andalouse. A partir de 711, les musulmans enchaînent les victoires sur la péninsule. Mais leur progression est stoppée net au sud de la France (dans les environs de Poitiers) en 732 après une rude bataille qui aurait duré 10 jours. Cette défaite oblige les conquérants omeyyades à changer de stratégie. A présent, ils entendent pérenniser leur présence en Andalousie et d’y jeter les bases d’un Etat prospère, notamment en nommant un gouverneur omeyade, proche de Moussa Ibn Noussaïr. Et Tarik Ibn Ziad dans tout cela ? Il aurait fini ses jours à Damas, dans une extrême pauvreté. Triste destin !

 

L’âge d’or

Les premières années de la présence arabe en Andalousie se déroulent sans heurts. Arabes, amazighs, juifs et chrétiens cohabitent paisiblement. Les non-musulmans sont autorisés à exercer leur culte contre le paiement d’un impôt. Mais voilà, le camp des vainqueurs se fissure. La rébellion ne vient pas des minorités juive et chrétienne, mais de l’intérieur même de l’armée conquérante. Les Amazighs, qui se sentent comme des citoyens de seconde zone, se rebellent contre l’aristocratie arabe. C’est le début d’une guerre fratricide particulièrement sanglante…

A des milliers de kilomètres de là, la dynastie des omeyyades tombe en 750. Elle est remplacée par celle des Abbassides, qui déplacent le centre du pouvoir de Damas à Bagdad. Ils mènent au passage une véritable guerre d’extermination contre les dignitaires omeyyades. Un seul d’entre eux arrive cependant à échapper au massacre et se réfugie au Maroc : le prince Abderrahmane. La légende raconte qu’il aurait traversé toute l’Afrique du Nord à pied, accompagné par l’un de ses fidèles serviteurs, appelé Badr. Tout comme ses aïeuls, Abderrahmane n’a qu’une obsession : réunifier l’Andalousie et mettre un terme aux guerres qui mettent à feu et à sang le territoire fraichement conquis. Fils d’une Berbère et d’un Arabe, il a des atouts pour apaiser les tensions qui déchirent l’Andalousie. Le jeune prince réussit à fédérer plusieurs tribus et traverse le détroit en 755, quatre décennies après Tarik Ibn Ziad. Il jette les bases d’une nouvelle dynastie et choisit Cordoue comme capitale. Il y fait construire une grande mosquée, directement inspirée dans grandes bâtisses de Damas. Même s’il décède à l’âge de 54 ans, Abderrahmane permet à ses descendants de régner en toute quiétude. Et c’est justement cette stabilité qui permet à l’Andalousie de vivre son âge d’or. A partir des années 800, Cordoue devient en effet un centre commercial et culturel mondial. Juifs, chrétiens et musulmans y vivent en paix. La ville attire même d’éminents intellectuels orientaux à l’image de Ziriab, musicien virtuose arrivé de Bagdad en 822. C’est par exemple lui qui introduit le Oud sur la péninsule et qui y crée le premier conservatoire de musique. L’Andalousie devient une terre cosmopolite d’art et de culture qui concurrence les grandes cités d’Orient. Damas et Bagdad n’ont d’ailleurs plus le monopole de l’élégance et du raffinement. Gastronomie, poésie, musique, littérature, sciences… les Andalous s’affranchissent progressivement de l’autorité des Abbassides et créent leur propre savoir-vivre. En 929, Abderrahmane III, descendant de Abderrahmane 1er, devient même calife et Commandeur des croyants. Un titre dont les Omeyyades ont été privés depuis la chute de Damas en 750. Aberrahmane III, dit Annasser, envoie ses émissaires dans le monde entier vanter les mérites de la péninsule. Les rues éclairées (grand signe de modernité), les bibliothèques, les encyclopédies médicinales … tout cela fait la fierté de Cordoue et de l’Andalousie entière. Le développement de l’agriculture est accéléré par l’essor de l’irrigation par roue hydraulique. Les jardins du calife n’ont alors rien à envier à ceux d’Orient ou des grands pays d’Europe. Abderrahmane III dote également l’Andalousie d’une flotte impressionnante qui lui a permis de régner sans partage pendant plus de 50 ans. Il a également entamé la construction d’une ville, dite Medina Zahara, censée devenir la nouvelle capitale de l’Andalousie et qui a englouti des sommes astronomiques. Sur le chantier, 10 000 ouvriers travaillaient d’arrache-pied. Mais le calife décède sans jamais voir sa cité. Ses descendants auront du mal à terminer son œuvre.

 

Ibn Tachfine, le sauveur !

Al Mountassir Billah est décrit dans les livres d’histoire comme un calife plus porté sur la culture que la politique. Grand lecteur, il se passionnait pour la poésie ou l’astronomie mais n’accordait guerre d’importance aux affaires de l’Etat. Lorsqu’il décède en 976, le prince héritier n’est encore qu’un enfant. Un conseil de régence est alors mis en place. Il est dirigé d’une main de fer par l’ancien chambellan du Palais (Ibn Abi Amer), qui finit par transmettre le califat à ses propres enfants. L’Andalousie entre alors dans une ère de luttes pour le pouvoir qui se solde par l’apparition des Taifas. Des émirats indépendants dirigés par des princes un peu partout en Andalousie, ce qui a considérablement affaibli le pouvoir central sur la péninsule, aiguisant l’appétit des Rois catholiques. Réfugiés au nord, ils rêvent toujours de récupérer le territoire conquis par les musulmans.

Au sud du détroit, les Almoravides, menés par Youssef Ibn Tachfine, prennent le pouvoir au Maroc. Ce dernier est appelé au secours par Al Moâtamid Ibn Abbad, prince de la Taifa de Séville, encerclée par les troupes du roi Alphonse VI. Ibn Abbad n’est pas dupe. Il sait que Youssef Ibn Tachfine risque de le déposséder du pouvoir. Il n’en a cure. “Je préfère garder les chameaux en plein désert que donner à manger aux sangliers”, aurait-il confié à ses proches. En arrivant à Séville, Ibn Tachfine est scandalisé par l’opulence dans laquelle vit le roi andalou. Les mœurs des habitants l’horripilent, tout comme la mixité entre juifs et musulmans. Deux conceptions de l’islam s’entrechoquent. L’un est andalou, ouvert, tolérant et imprégné par les cultures européennes et orientales. L’autre est né dans le désert. Il est donc plus strict et plus austère. Youssef Ibn Tachfine bat le roi Alphonse VI lors de la bataille d’Azzalaqa en 1086 et retarde ainsi la chute de l’Andalousie pour au moins cinq siècles. Il rentre au Maroc mais les rois des Taifas se livrent de nouvelles batailles et complotent contre le roi almoravide. Ibn Tachfine traverse le détroit une nouvelle fois et destitue Al Moâtamid Ibn Abbad qu’il fait prisonnier à Ghmat, dans la région du Marrakech, où il décède cinq ans plus tard. Une bonne partie de l’Andalousie est alors annexée par les Almoravides qui chamboulent le mode de vie des habitants. Les livres controversés sont brûlés afin de purifier la religion. “A leurs yeux, le royaume islamique en Andalousie est tombé à cause de cette étrange et malsaine ouverture sur l’Occident”, explique un spécialiste. Malgré cela, les Almoravides assistent, presque impuissants, au retour en force des royaumes chrétiens, plus menaçants que jamais.

En 1147, les Almohades succèdent aux Almoravides. Plus orthodoxes, ils prêchent un islam encore plus rigoureux. L’Andalousie fait naturellement partie de leur butin de guerre. Ils y mènent plusieurs campagnes contre les Rois catholiques et réussissent à asseoir leur autorité sur de grandes villes. Mais leur victoire sera de courte durée. Après le décès de Yaâcoub El Mansour, auteur de la dernière grande victoire musulmane en 1195, les villes andalouses tombent les unes après les autres entre les mains des armées chrétiennes dans le cadre d’une reconquête cathollique dite “Reconquista”. Une seule ville résiste pendant près de deux siècles : Grenade.

 

Le dernier bastion

Nichée au cœur des montagnes de la Sierra Nevada, Grenade est alors une petite ville, sans grande importance. Elle n’a pas véritablement connu d’âge d’or mais elle représente le dernier bastion de la présence arabo-musulmane en Andalousie, ce qui explique la grande sympathie (et la nostalgie) qu’elle suscite chez des millions d’Arabes partout dans le monde. Grenade a même eu son petit Etat fondé par Mohamed Ibn Al Ahmar qui a donné son nom au palais de la ville : Alhambra ou Palais Al Hamra en arabe. Grenade a également pu compter sur le soutien militaire des Mérinides au Maroc, et dont les sultans n’hésitaient pas, tout comme Youssef Ibn Tachfine, à traverser le détroit pour défendre le dernier carré musulman d’une Andalousie désormais chrétienne.

Grenade a ainsi vécu, fière et libre, jusqu’en 1479. Les royaumes de Castille et d’Aragon fusionnent à l’occasion du mariage du roi Ferdinand 1er et de la reine Isabelle la Catholique. Les deux rois catholiques organisent le siège de Grenade dont les habitants sont obligés, selon des chroniqueurs, de manger les chats et les chiens. Le roi du petit émirat musulman (Abou Abdallah Assaghir) capitule en novembre 1491 et signe un accord de reddition de la ville. La cité passe officiellement sous contrôle des Rois catholiques le 2 janvier 1492. Les Banou Al Ahmar émigrent alors à Fès où ils se fondent parmi la population locale.

A Grenade, le pacte passé avec les Rois catholiques prévoyait de permettre aux habitants musulmans de la ville de conserver leur religion. Mais très vite, livres, exemplaires de coran, manuscrits et meubles arabes sont brûlés sur les places publiques. La reine Elizabeth rêve même de convertir le Maroc au christianisme ! Mais un événement changera définitivement les visions stratégiques de l’Espagne : la découverte de l’Amérique. En 1492, Christophe Colomb aurait en effet assisté à la messe donnée à l’Alambra à l’occasion de la victoire catholique sur les rois musulmans. Et c’est bien la reine Isabelle qui lui fournira les moyens nécessaires pour aller à la conquête du nouveau monde.

 

La plaie morisque

Mais à Grenade, les musulmans (appelés les Morisques, après avoir été forcé à se convertir au christianisme) souffrent le martyre. Ils sont victimes de discrimination, leurs biens sont spoliés… Tout est fait pour les convertir au christianisme. Plusieurs tribus embrassent la religion voulue par l’Eglise, changent leurs noms et leurs rites pour avoir la paix. Mais le processus est long. L’islam est décidément difficile à déraciner. En 1526, l’Eglise passe à la vitesse supérieure. La langue arabe est bannie à Grenade, tout comme les habits et les ornements musulmans. La circoncision est interdite, tout comme le sacrifice de bétail selon le rituel musulman. Des tribunaux d’inquisition sont mis en place pour traquer les contrevenants. Régulièrement, les habitants musulmans se rebellent mais leur mouvement de contestation est, à chaque fois, sauvagement réprimé. Le 9 avril 1609, le roi Philippe III signe une décret obligeant les derniers Morisques d’Espagne à quitter l’Andalousie. En tout, on estime à 300 000 personnes le nombre de musulmans déportés d’Andalousie. Beaucoup se sont retrouvés au Maroc, mais aussi en Algérie, en Tunisie, voire en France.

Aujourd’hui, cette période reste l’une des pages les plus sombres dans l’histoire espagnole. A cause du poids de l’Eglise dans la vie sociale espagnole, le pays a eu beaucoup de mal à reconnaître sa responsabilité dans les horreurs perpétrées contre les Morisques après la chute de Grenade. En 1992, le roi Juan Carlos a pourtant cassé l’omerta en présentant des excuses officielles aux juifs d’origine maure. Un premier pas suivi, dès 2012, par une décision gouvernementale accordant la nationalité espagnole à tout citoyen juif qui prouve ses origines morisques. “Pour les musulmans, c’est plus difficile, explique ce spécialiste. D’abord, parce qu’ils ne disposent pas de lobbys assez forts et parce que le Maroc, qui a accueilli le plus grand nombre de migrants, considère désormais ces derniers comme des sujets de Sa Majesté au même titre que tous les autres”. La page est-elle ainsi définitivement tournée ?

(*) Journaliste et chercheur en relations marocco-espagnoles.

 

Descendance. Familles andalouses

Les membres de plusieurs grandes familles marocaines sont des descendants directs des Morisques espagnols. A Fès, citons par exemple les familles Bensouda, Fassi Fihri, Benhayoun, Benchaqroun et Al Ahmar. A Tétouan, des familles portant des noms à la résonance espagnole comme Torres, Randi, Kachtilou, Moulina ne laissent aucun doute quant à leurs origines. D’autres familles, avec des racines arabes mais longtemps installées en Andalousie, ont également émigré au Maroc, comme les Bendourou, Belkahia ou Bargach que les Espagnols prononcent Bargas. L’héritage andalou a également été perpétué à Salé à travers de grandes familles comme les Hassar, Zniber et Fennich.

 

 

Extrémisme. La parenthèse désenchantée

L’arrivée des Almoravides puis des Almohades en Andalousie a totalement chamboulé le quotidien des habitants de la péninsule. Porteurs d’une conception rigide de l’islam, ils sont d’abord scandalisés par ces musulmans européens qui boivent de l’alcool, qui écoutent de la musique et qui fréquentent juifs et chrétiens. En s’emparant de Séville (qu’ils sont venus défendre contre les Rois catholiques), les Almoravides brûlent des bibliothèques entières, recélant parfois des manuscrits rarissimes et des ouvrages de référence, inexistants en Europe ou en Orient. Tout ce qui n’est pas basé sur le Coran et qui ne respecte pas à la lettre l’esprit de la religion est immédiatement détruit. Plus orthodoxes, les Almohades arrivent en 1148. Eux vont encore plus loin. ls rêvent de réunifier toutes les Taifas en un seul Etat islamique, fondé sur le livre sacré et la morale. La société andalouse le prend comme une oppression. Juifs et chrétiens sont soumis à de lourds impôts. Ils sont stigmatisés, persécutés. Plusieurs habitants choisissent l’exil, parfois en territoire chrétien qu’ils font bénéficier de leur savoir et de leur expertise dans plusieurs domaines comme la médecine, la philosophie et l’agriculture. L’Andalousie d’antan n’y survivra finalement pas.

 

 

 

Héritage. Gastronomie, musique...

La ville de Fès a sans doute hérité d’une grande partie du savoir-faire gastronomique andalou. Des plats devenus traditionnels comme la Mrouzia, la Pastilla et la Chebbakia auraient ainsi des origines andalouses. Ils auraient été introduits par les migrants morisques à partir de l’an 1492 pour devenir des plats marocains à part entière. Ce savoir-faire gastronomique est encore présent sur la péninsule ibérique également. Avec le temps, les noms des plats ont certes changé, mais des similitudes persistent entre plusieurs plats désormais espagnols et d’autres typiquement orientaux. C’est notamment le cas de la salade “Pepe Rana” qui s’approche beaucoup du Fattouch syrien ou libanais. La région d’Alpujars, dans les montagnes de la Sierra Nevada, a également perpétué la tradition d’un plat (Migas Alvojarinias) à base de semoule et de légumes, qui ressemble beaucoup au couscous que les Morisques auraient introduit au Maroc également. Et puis, il y a la musique. Qui ne connaît pas Attarab Al Andaoussi ? Egalement appelé Al Ala, la musique andalouse est (encore aujourd’hui) quotidiennement diffusée en début d’après-midi sur les radios nationales en plus d’accompagner toutes les grandes cérémonies et fêtes religieuses. A mi-chemin entre les musiques africaines et orientales, les bases de cette musique ont été jetées par Abou El Hassan Ali Ben Nafiq et Ziriab qui auraient composé des milliers de chants et en instituant le cycle des noubat, composées de formes poétiques comme les Muwashahat. La musique andalouse n’est pas présente uniquement au Maroc. Des variantes comme le gharnati (en référence à Grenade) ou le Malhoun sont encore aujourd’hui très populaires en Algérie et en Tunisie.

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