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N'y a-t-il pas de liberté pour la femme juive? par Eliette Abecassis

N'y a-t-il pas de liberté pour la femme juive?

 

par Eliette Abecassis

Le problème du Guett (acte de divorce juif) est aujourd'hui l'un des problèmes les plus urgents à résoudre du judaïsme contemporain. Dans le droit rabbinique, une femme ne peut être considérée comme divorcée religieusement que si son mari lui accorde le Guett. De nombreux maris accordent le Guett sans poser de problème. D'autres en profitent pour exercer une forme de chantage à l'égard de leur femme, ou pour leur refuser tout simplement le divorce, et dans ce cas, elles restent enchaînées, parfois à vie, à leur mari.

Le chantage s'exerce dans deux directions:

  • Soit par le refus de délivrer le Guett à son épouse alors que le divorce civil a été prononcé. Cela n'a d'autre but que celui d'entraver sa vie en la tenant captive de la volonté de son mari et en l'empêchant de refonder un autre foyer ou d'avoir des enfants. Il en résulte que le mari peut fréquenter les femmes qu'il désire alors qu'elle doit s'interdire toute relation.
  • Soit par le refus de donner le Guett à l'épouse alors que la procédure du divorce civil est engagée. Ce refus n'a d'autre but que celui d'exercer un chantage financier et moral influant ainsi sur les décisions prises dans le divorce civil (renoncement à une prestation compensatoire, diminution de la pension alimentaire pourtant destinée aux enfants, liquidation patrimoniale inégalitaire, ou pire, chantage sur le droit de garde et d'hébergement des enfants).

Le Grand Rabbin de France, Gilles Bernheim, a pris l'heureuse initiative d'organiser, pour la première fois, un colloque sur les femmes Agounot (les femmes à qui l'on refuse le divorce) qui aura lieu le 13 mai prochain, à Paris.

C'est une grande avancée, qui rompt l'inacceptable silence des rabbins devant cette situation dans laquelle sont abandonnées des milliers de femmes juives en France et dans le monde, silence qui est le signe ostensible d'une caution à un usage pervers de la Loi juive, d'une complicité devant la spoliation de ces femmes contraintes d'acheter leur liberté, et d'une impassibilité devant une souffrance morale qu'ils sont dans l'incapacité de reconnaître et de comprendre.

Cependant, le colloque étant placé sous la tutelle du Consistoire, il est très regrettable que ne soit pas conviées à la table ronde, les personnalités spécialistes de cette question, comme le professeur Liliane Vana, l'incontournable experte du sujet, autant du point de vue de la théorie, que de la pratique (défense active des femmes Agounot).

Il est regrettable que soient conviés les principaux acteurs français de la maltraitance rabbinique des femmes Agounot. Il est encore plus regrettable que les femmes invitées à "témoigner", aient été incitées à ne pas parler du fond du problème, et de l'attitude du Consistoire: incitation à céder au chantage et à payer au mari la somme qu'il réclame, même si elle est exorbitante, mépris et humiliations des femmes dans la détresse: "Madame, un guett, ça s'achète!" (sic).

En revanche, des spécialistes israéliens ont été invités à communiquer sur des méthodes qui sont mises en défaut par les responsables du Consistoire. Comme le montrent plusieurs exemples récents, lorsqu'une solution israélienne est appliquée (annulation du mariage), le service de divorce du Consistoire refuse de la "reconnaître". Autrement dit, lorsqu'une femme a réussi à se libérer de cette épreuve morale et physique, le Consistoire ne lui reconnaît pas ce droit, tout en restant parfaitement opaque sur ses agissements.

En vérité, cette journée originellement destinée aux femmes Agounot a été planifiée de manière à occulter la réalité, à confisquer la parole des femmes, et à la dissoudre dans des discours lénifiants à la gloire du Consistoire. Quand donc cette mascarade cessera-t-elle? N'y a-t-il pas de liberté pour la femme juive au sein du Consistoire français?

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