Quand les Français d’Israël se chamaillent, ceux d’Italie dansent
Le vote des Français d’Israël lors des élections présidentielles a été riche d’enseignement. Tout le monde aura remarqué que 92% des voix sont allées à Sarkozy, moins ont noté qu’à peine 21% des électeurs se sont déplacés au second tour – et 15% au premier tour -, un des taux les plus bas au monde.
Ce taux est particulièrement faible si on le met en relation avec le taux de participation dans les autres pays qui forment la 8eme circonscription, et en particulier l’Italie. Ainsi, alors que les électeurs en Israël comptent pour 56% de tous les électeurs de la circonscription, ils ne représentent qu’environ 40% des votants. Au premier tour, plus de Français d’Italie ont voté – 10,000 – que de Français en Israël alors que le nombre d’électeurs inscrits en Italie est presque la moitié de celui d’Israël. Au second tour, malgré un sursaut significatif en Israël, le nombre de votants dans les deux pays est resté très proche: 13,000 en Israël contre 12,000 en Italie. Et cela n’inclut pas les milliers d’autres électeurs en Grèce, Turquie et ailleurs. Aux législatives, il est plus que probable qu’on retrouve les mêmes proportions.
J’expliquais déjà en décembre dernier que la multiplication des candidats centrés sur Israël serait fatale à la cause des Franco-Israéliens. Depuis les choses ont évolué. Edouard Amiach, pour ces exactes raisons et tout à son honneur, a décidé de se retirer, tandis que Philippe Karsenty a mis l’accent de sa campagne sur les autres pays et obtenu le soutien d’une partie de l’UMP d’Italie. D’autres candidats marginaux sont apparus depuis qui n’influeront apparemment en rien sur l’élection en Israël.
Mais reste l’énigme Gil Taieb, une personnalité aimée, qui a fait beaucoup pour Israël et la communauté juive, mais qui ne semble pas avoir compris qu’il se présentait à des élections législatives françaises et pas des élections strictement judéo-juives. Sa volonté affichée de ne s’occuper que des Franco-Israéliens lui aliène à coup sur le vote de tous les autres Français. Or, comme les élections l’ont démontré, ces “autres” formeront la grande majorité des électeurs et ainsi Gil Taieb n’a absolument aucune chance de gagner ni même d’accéder au second tour.
Sa candidature, dans ces conditions, ne peut que nuire aux chances de victoire d’un candidat portant Israël dans son coeur. Elle renforce en particulier les deux candidats de gauche qui sont basés en Italie: Pierre Jestin, de Europe-Ecologie-Les Verts et Michele Parravicini du Front de Gauche. Sachant que la candidate du PS, Daphna Poznansky, est Israélienne, il est douteux que de nombreux Français de gauche veuillent voter pour elle. Surtout, de la même manière que les Français d’Israël veulent un député qui les représente, le fait d’être basé en Italie sera un atout particulièrement important pour ces deux candidats face a l’électorat de gauche, qui est majoritaire chez les Français d’Italie.
Plus les candidats pro-Israël seront divisés, plus les chances seront grandes de voir élire un de ces deux candidats en fin de compte. Valerie Hoffenberg attirera sans doute peu de voix en Israël au premier tour mais peut espérer une partie des voix de droite hors d’Israël. Daphne Poznansky peut, en dépit de son identité israélienne, compter sur son étiquette PS et capter une partie de l’aura de la victoire de François Hollande. Philippe Karsenty peut s’appuyer sur son statut de leader des intentions de vote des Français d’Israël et s’attendre au soutien d’une partie de la droite des autres pays.
Des 4 grands candidats qu’on peut qualifier plus ou moins de pro-Israël, Gil Taieb est celui dont les chances sont clairement les plus réduites. Il serait donc bien qu’il en tire les conséquences en suivant le noble exemple d’Edouard Amiach.
© Benjamin Lachkar
Source : http://benjilachkar.wordpress.com/
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