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Israël réfléchit au "jour d'après" une frappe contre l'Iran

 

par Crispian Balmer

 

JERUSALEM (Reuters) - "Le débat aujourd'hui porte moins sur l'option militaire en elle-même que sur ce qui se passera ensuite." Cette phrase d'un ancien stratège de l'armée israélienne illustre en partie l'état d'esprit qui entoure, en Israël, la perspective d'une frappe militaire contre l'Iran.

Après les propos lourds de menace du Premier ministre Benjamin Netanyahu lors de sa récente visite à Washington, les analystes israéliens ne s'interrogent plus tant sur la faisabilité d'un bombardement des sites nucléaires iraniens que sur les conséquences d'une telle action.

"Le principal point de discussion, c'est de savoir ce qui va se passer une fois que l'option militaire aura été employée. Nous supposons que la réponse des Iraniens va être violente, mais jusqu'à quel point?", poursuit Michael Herzog, ancien responsable de la planification stratégique de Tsahal.

Si l'ambassadeur d'Iran en France, Ali Ahani, a déclaré jeudi dans une interview à Reuters que son pays "ne croit pas" à des frappes israéliennes, Téhéran n'en a pas moins menacé à plusieurs reprises Israël et les Etats-Unis de représailles, et certains experts militaires israéliens s'attendent à ce que ses alliés, à commencer par le Hezbollah libanais, lui emboîtent le pas.

L'Iran dispose d'un nombre inconnu de missiles balistiques capables d'atteindre le territoire israélien, et le Hezbollah de quelque 50.000 roquettes, dont certaines pourraient sans aucun doute frapper la région densément peuplée de Tel Aviv.

Mais des experts, peut-être soucieux de rassurer une opinion publique majoritairement défavorable à ce qu'Israël s'engage seul dans un conflit, avancent que la capacité de nuisance de l'Iran pourrait ne pas être si élevée, l'Etat juif étant doté d'un puissant bouclier anti-missiles.

"PRÉVISIONS APOCALYPTIQUES"

"Les prévisions apocalyptiques de ce qui se passerait si Israël attaquait l'Iran doivent être relativisées", a déclaré cette semaine Giora Eiland, ancien conseiller à la sécurité nationale, sur les ondes de Radio Israël.

Paradoxalement, le "printemps arabe" qui a tant inquiété les Israéliens, préoccupés de voir émerger des régimes islamistes à leurs frontières, pourrait aussi jouer en leur faveur en cas de conflit avec l'Iran.

Le soulèvement en Syrie a considérablement fragilisé le régime de Bachar al Assad, qui a désormais d'autres priorités que de servir les intérêts de son allié iranien.

"L'hypothèse de voir la Syrie se sacrifier pour l'Iran n'a jamais été très crédible, mais il est encore plus probable qu'elle se tienne à l'écart aujourd'hui", résume Amos Yadlin, ancien responsable des services de renseignement militaires et chef de l'Institut pour les études de sécurité nationale.

Le chaos en Syrie pourrait présenter un autre avantage pour Israël en coupant les lignes d'approvisionnement du Hezbollah, dont la plupart des armes transiteraient par le territoire syrien.

Certains analystes israéliens vont même jusqu'à se demander si le mouvement chiite libanais ne préférerait finalement pas rester neutre pour préserver ses forces.

Ils citent en exemple l'opération "Plomb durci" lancée par Israël dans la bande de Gaza fin 2008, pendant laquelle le Hezbollah s'était abstenu d'ouvrir un second front, comme le Hamas l'y appelait, après avoir subi les intenses bombardements israéliens de la guerre de 2006 au Liban.

Le chef du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, a reconnu pour la première fois publiquement le mois dernier que son mouvement était financé et armé par Téhéran, mais il a assuré que l'Iran ne solliciterait pas son aide s'il est attaqué.

RECOURS ULTIME

Israël ne peut toutefois pas faire un tel pari et se prépare donc en conséquence. "Les Iraniens ont donné (au Hezbollah) toutes ces roquettes précisément pour qu'ils soient prêts pour ce genre de scénario", rappelle Michael Herzog.

Vu de Jérusalem, le Hamas présente une menace moindre. Le mouvement islamiste palestinien a pris ses distances avec ses alliés iraniens et surtout syriens depuis le début du "printemps arabe" et semble vouloir davantage s'aligner sur la stratégie politique des Frères musulmans en Egypte.

La participation du Hamas à une guerre ouverte est donc jugée faible, comme la capacité des autres mouvements radicaux de Gaza, Djihad islamique en tête, à causer des dégâts sérieux.

"Sans vouloir sous-estimer le Hamas, c'est une goutte d'eau dans la rivière à l'échelle de la Syrie, du Hezbollah ou de l'Iran", fait valoir Amos Yadlin, qui était aux commandes d'un des avions qui ont bombardé la centrale nucléaire irakienne d'Osirak en 1981 - sans réponse de Bagdad -, de même que Damas n'a pas réagi au bombardement d'une probable installation nucléaire en 2007.

Personne ne s'attend à ce que l'Iran se montre aussi docile mais pour les dirigeants israéliens, le remède n'est sans doute pas pire que le mal - la menace d'un "Holocauste" nucléaire qui planerait sur le peuple israélien, évoquée en creux par Benjamin Netanyahu à Washington. Le ministre de la Défense Ehud Barak a même prédit que les représailles iraniennes ne coûteraient "peut-être même pas" la vie à 500 civils israéliens.

Certains commentateurs ne partagent pas cet optimisme et rappellent que la guerre doit rester un recours ultime.

"Les générations futures sont face à la perspective d'une guerre qui ne sera justifiée que si nous sommes vraiment convaincus que l'avenir d'Israël est en danger", insiste Yehuda Lancry, ancien ambassadeur d'Israël en France et auprès des Nations unies.

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