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Le Marcheur de Fès, par Eric Fottorino: Maurice le Fassi

 

Par Marianne Payot

 

 

Avec Le Marcheur de Fès, Eric Fottorino revit la jeunesse de son père biologique. Vibrant. 

 

Finalement, il y est allé tout seul. Sans son père "naturel", ce médecin gynécologue dépisté à l'âge de 17 ans, puis dédaigné trente ans durant, et avec qui, enfin, il s'est réconcilié. Ce père, Maurice Maman, qui, avec l'autre père, l'adoptif, Michel Fottorino, nourrit depuis 2009 l'oeuvre du journaliste et écrivain Eric Fottorino. Donc, Eric est parti pour Fès, mettre ses pas dans ceux de Moshé-Moïse le Fassi, devenu Maurice le Français, reconstituer l'enfance et la jeunesse de cet homme qui, repoussé par "sa belle-famille" catholique de Bordeaux, n'éleva pas son fils. 

"Je cherche tes racines"

Tandis que Maurice lutte contre les tumeurs qui assaillent ses reins, Eric creuse ses origines. Dans l'ancien quartier juif du Mellah, fort, au début du protectorat, de quelque 20 000 âmes, protégées puis discriminées au fil des conflits du Moyen-Orient, le "fils par raccroc" trébuche sur des ombres. Là, le cimetière où repose la soeur de son père, morte à 17 ans dans un accident de voiture; ici, des ruelles défigurées avec, au loin, la sublime Karaouine, la plus ancienne mosquée-université du monde. Maurice, le basketteur averti, vivait à deux encablures de là, dans la ville qui n'a plus de nouvelle que le nom. 

A 16 ans, fasciné par la modernité et par la France, le futur Dr Maman s'éloigna de la pratique religieuse, préférant les séances du cinéma le Bijou à la Torah. "Je cherche tes racines, pas une religion", lance Eric. Pourtant, c'est aussi cela que le fils est venu appréhender ici, cette part de judéité en lui qui lui est étrangère. Sautant les décennies, Le Marcheur de Fès chemine, tente de renouer le fil, doute, est pris de vertige, comme "en flagrant délit de mensonge". 

Comment être plus lucide? Plus sincère? Plus aimant? Avec ce troisième récit dédié au(x) père(s), Eric Fottorino nous livre encore une fois une partition délicate, aussi grave que tendre. 

 

Le Marcheur de Fès, par Eric Fottorino. Calmann-Lévy, 192 p., 16,50euros. 

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