Netanyahu face à l’épreuve (info # 012603/10) [Analyse]
Par Guy Millière © Metula News Agency
Sordide. C’est le mot qui m’est passé par la tête immédiatement lorsque j’ai regardé et écouté le discours prononcé par Hillary Clinton lors de la réunion de l’AIPAC à Washington. Si j’avais dû parler à haute voix à quelqu’un d’autre, j’aurais pu utiliser un adjectif plus modéré et plus poli, disons... minable.
Après avoir utilisé la formule obligée dans un tel lieu et en de telles circonstances, et parlé des « liens indéfectibles » liant l’administration en place à Washington avec Israël, la Secrétaire d’Etat est passée à un sujet qui, pour elle, n’était pas le principal : l’Iran.
Pour dire que ce que l’administration cherchait, c’étaient des sanctions, mais que parvenir à des sanctions qui « mordent », cela prenait « du temps ». Elle n’a pas ajouté que cela pouvait prendre tellement de temps, qu’au moment où d’éventuelles sanctions seraient votées, elles ne serviraient plus à rien. Mais il est clair que c’est ce que l’auditoire a compris : le silence de la salle en cet instant a été éloquent.
Elle n’a pas déclaré que toutes les options étaient envisagées, cela va de soi : cela aurait pu froisser Ahmadinejad. Quelques jours après qu’Obama lui eut envoyé un mot gentil pour le nouvel an iranien, cela n’aurait pas été adéquat. Et puis, c’est évident : aucune option n’est effectivement envisagée.
La question iranienne ayant été évoquée, et évacuée, il restait à passer à l’essentiel. Expliquer subtilement à une salle de gens soutenant Israël le virage radicalement anti-israélien qui est au cœur de la nouvelle politique américaine.
L’exercice n’était pas facile. Mais Hillary s’y est livrée aussi bien qu’elle le pouvait. Elle a commencé, avec un sourire forcé, utilisant le mot « amitié » : « amitié », bien sûr…
Elle a aussitôt ajouté qu’ « entre amis, on doit se dire la vérité ». Le reste pouvait suivre. Certes, déclara Hillary, il existe des incitations à la violence du côté palestinien, mais, tout de même ! Ces constructions israéliennes à Jérusalem !
Les gens les plus attentifs de l’auditoire ont pu découvrir quelques mots plus tard, que le statut de Jérusalem ferait partie des négociations - certains se sont sans doute souvenus d’une phrase prononcée, voici deux ans, dans la même enceinte, par Obama lui-même, et qui disait diamétralement le contraire, mais c’était il y a deux ans - .
Ils ont appris que l’administration Obama encourageait une « culture de paix et de tolérance chez les Palestiniens », avec les résultats extraordinaires que l’on constate quotidiennement, et que l’avancée vers la « paix » était de la « responsabilité » essentielle d’Israël.
Pour ne pas froisser Mahmoud Abbas, ou un autre des gentils garçons épris de paix qui siègent à Ramallah, Hillary a même eu l’obligeance de dire qu’une municipalité "aux mains du Hamas" venait de dédier une place publique à la terroriste Dalal Moghrabi ???
Insulter Israël et son Premier ministre, pour Hillary, comme elle l’a fait récemment au téléphone, c’est possible, mais attribuer à l’Autorité Palestinienne ce que fait l’Autorité Palestinienne, qui ne cesse d’honorer des terroristes pour montrer à quel point elle est « modérée », non : pour Hillary, c’est impossible.
Parce que les gens de l’AIPAC sont polis, ils ont applaudi à la fin. A leur place, j’aurais applaudi aussi : pour me réjouir de n’avoir plus à entendre d’autres insanités, et parce que cela fait du bien quand les balivernes de ce genre s’arrêtent.
A mes yeux, Hillary et Obama ont un point commun : ils disent la vérité uniquement quand ils se taisent. Malheureusement, ils ne se taisent pas assez souvent.
Après avoir regardé et entendu le discours d’Hillary, j’ai regardé et ouï celui de Binyamin Netanyahu, et, je dois le dire, j’en avais besoin, comme après avoir reçu une dose de poison, on peut ressentir le besoin urgent d’un antidote. Une fois de plus, je le dis, j’ai trouvé le Premier ministre d’Israël admirable de clarté, de détermination et de subtilité.
Il est allé aussi loin qu’il le pouvait pour contrer la basse offensive de l’administration Obama, et il l’a contrée. Efficacement. Il devait, pour cela, répondre aux inepties qu’on lui avait, de diverses façons, jetées au visage, et il a répondu : en rétablissant la vérité.
Sachant qu’il n’avait rien à attendre de l’administration Obama, il s’est adressé, au delà de l’auditoire de l’AIPAC, au peuple américain, et je pense que c’est exactement ce qu’il devait faire.
Il lui a expliqué de manière magistrale en quoi ses positions étaient, pour l’essentiel, celles de tous les gouvernements israéliens depuis des décennies. Il a exposé la situation dans laquelle se trouve Israël en matière de sécurité. Il a souligné que les dangers auxquels Israël était confronté ne concernaient pas seulement Israël, mais aussi, très directement, les Etats-Unis.
Et que, contrairement aux insinuations d’Obama, Israël ne mettait pas en danger les troupes américaines, mais, au contraire, en étant en première ligne face au danger islamo-terroriste, contribuait à protéger la paix du monde. Il a dit à propos de l’Iran ce qui devait être dit.
Il a rappelé l’histoire de Jérusalem et a prononcé sur ce sujet une phrase que j’ai particulièrement appréciée : « Le peuple juif construisait Jérusalem il y a trois mille ans, et le peuple juif construit Jérusalem aujourd’hui. Jérusalem n’est pas une implantation, c’est notre capitale ».
J’espérais qu’il trouve des accents dignes de ceux que je discerne en lisant les discours de Menahem Begin : Binyamin Netanyahu a été à la hauteur de mes espoirs.
Il n’y a pas de différence entre construire à Tel-Aviv et construire à Jérusalem
J’ai regretté, une fois de plus, qu’il n’ait pas été Premier ministre au temps où c’était un ami d’Israël qui était à la Maison Blanche. J’ai songé qu’en un temps où c’est un ennemi résolu d’Israël qui a remplacé un ami d’Israël, il était bien, cela dit, que ce soit un homme de cette qualité et de cette trempe qui ait à affronter l’épreuve. Car c’est d’une épreuve qu’il s’agit.
Dans les heures qui ont suivi son intervention à l’AIPAC, Binyamin Netanyahu a dû se rendre à deux réunions : l’une avec Hillary, l’autre avec l’ennemi résolu d’Israël.
La dernière fois que Binyamin Netanyahu s’était rendu à la Maison Blanche, Obama l’avait reçu à la nuit tombée, par la porte de service. Cette fois, le Premier Ministre d’Israël n’a pas eu à attendre que le soleil se couche, mais la consigne a été donnée par Obama : pas de photo, pas de communiqué, rien.
Obama veut bien être vu faisant des courbettes devant le monarque saoudien ou en train d’embrasser n’importe quel potentat islamique qui veut bien se laisser embrasser, mais être aperçu en présence du Premier ministre d’Israël lui paraît désormais impossible. Comprenne qui voudra.
Les rencontres avec Hillary et Obama n’ayant pas donné les résultats escomptés par Hillary et Obama, Binyamin Netanyahu a dû accepter de parler avec George Mitchell. Il a ensuite pris le chemin du retour.
On sait peu ou prou, même si aucun communiqué de presse n’a été publié, ce qui s’est dit à la Maison Blanche. Obama a énoncé des exigences inacceptables sur Jérusalem et sur les actions des forces de défense israéliennes en Judée-Samarie [et ailleurs. Ndlr.].
Il espérait faire céder son interlocuteur, en employant, comme on dit dans Le parrain, le ton de celui qui fait des offres qu’on ne peut pas refuser sans risquer de trouver des cadavres dans son jardin.
Binyamin Netanyahu n’a pas cédé, et c’est à son honneur. On peut faire des concessions tactiques à un ennemi, mais on ne peut pas lui faire des concessions stratégiques et suicidaires.
Je l’ai dit ici, et j’en suis persuadé : si Obama n’avait pas utilisé le prétexte de la construction de logements dans un quartier de Jérusalem, il aurait utilisé un autre prétexte. Avoir envoyé Joe Biden en visite en Israël est une action qui ne doit tromper personne : le vice-président, selon la Constitution américaine, n’a aucun pouvoir. Les premiers commentaires anti-israéliens de Biden remontent à 1982, et il en a fait d’autres depuis.
Je l’ajoute en pesant mes mots, et avec toute la gravité requise, ce qui doit être compris doit s’énoncer sans circonlocutions : Obama veut la mort d’Israël.
Pas la mort directe, immédiate, brutale, non : une mort programmée. Binyamin Netanyahu le sait. Obama est prêt à user de tous les moyens pour parvenir à ses fins. Déstabiliser le Premier ministre d’Israël, tenter de le faire apparaître comme étant dans son tort, diaboliser Israël à l’échelle internationale, Obama l’a fait et le fera encore.
Pour l’heure, le Congrès ne suit pas Obama sur ce terrain nauséabond, et c’est une bonne nouvelle.
Les gens de l’AIPAC ont semblé manifester le « remords de l’acheteur », et c’est une autre bonne nouvelle : on leur a vendu un Obama souriant et cordial, et ils découvrent qu’ils ont été trompés sur la marchandise (lorsqu’une photo de George W. Bush est apparue sur un écran, lors de la réunion de l’AIPAC, la photo a reçu une ovation, ce qui, venant d’une assemblée plutôt Démocrate, est intéressant à noter).
Il ne faut, cela dit, jamais se contenter d’une ou deux bonnes nouvelles lorsqu’il s’agit d’Obama.
L’opinion publique américaine ne suit pas Obama, mais Obama n’a que faire de l’opinion publique et de ce que pense le peuple américain. C’est un homme qui ne recule devant rien, comme il vient de le montrer, en faisant passer une loi sur le système de santé, dont deux tiers des Américains ne veulent absolument pas, et en usant pour cela de stratagèmes plus ou moins sordides et de chantages maffieux.
C’est un homme qui, et je l’écris là encore avec toute la gravité requise, veut non seulement la mort d’Israël, mais la mort, aussi, des Etats-Unis tels qu’ils sont depuis le temps des pères fondateurs.
C’est un homme qui n’aime pas les Etats-Unis d’Amérique, le capitalisme, la civilisation occidentale et qui préfère l’islam, y compris l’islam radical, le socialisme, les dictateurs, la vision ressentimentale du monde, qu’il a en commun avec Poutine, Chavez et quelques autres individus peu fréquentables pour toute personne qui n’apprécie pas la fréquentation des truands.
Si je devais lui consacrer un livre, je serais tenté de le comparer à l’Arturo Ui dépeint par Brecht. Il lit bien les discours. Il sourit. Il a des conseillers et des hommes de main.
Mais il vient des bas fonds de Chicago. Il vient du gauchisme, de l’islamisme, de la doctrine révolutionnaire élaborée par son principal inspirateur Saul Alinsky. J’ai, dans des articles précédents, indiqués les noms qui jonchent son passé, et une quête rapide sur un moteur de recherche permettra de voir qui sont ceux qui portent ces noms : Bill Ayers, Rachid Khalidi, Tony Rezko, Jeremiah Wright, Ali Abunimah, Louis Farrakhan, Michael Pfleger, Khalid al-Mansour.
Ce qui va se jouer dans les mois à venir sera la survie d’Israël, certes, mais aussi celle des Etats-Unis.
Mark Steyn, l’auteur d’America Alone, est très pessimiste. Bien plus que je ne le suis. Thomas Sowell, l’un des grands penseurs de ce temps, est très pessimiste lui aussi.
En ce qui me concerne, je dirai ici qu’il n’y a pas d’autre choix que de se battre. Avec détermination. Mais sans illusion concernant l’ennemi, où qui il soit.