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Enquête : Ils tuent en Israël et fuient vers la France

Enquête : Ils tuent en Israël et fuient vers la France

 

Deux Français sont suspectés d’avoir renversé et abandonné une jeune femme, avant de fuir vers la France, se mettant à l’abri de la justice israélienne.

Lee Zeitouni avait 25 ans. Elle était professeur de pilates – une sorte de yoga – dans un club de sport du nord de Tel Aviv, en Israël. Vendredi, à l’aube, c’est là qu’elle se rendait, jusqu’à ce qu’elle croise la route de l’un de ces énormes 4 x 4 de luxe, un BMW X6 noir, lancé à pleine vitesse, grillant un feu rouge. Quelques minutes plus tard, il ne restait de la scène que des vestiges. Le corps de Lee Zeitouni, percuté par le véhicule, puis projeté contre une autre voiture allant dans l’autre sens. Un téléphone portable en miettes. Des débris divers, des policiers en gilet de sécurité examinant les environs. Du véhicule tout-terrain, il ne reste pas de traces. Ses passagers ont fui à son bord.

 

Dès lors, la police lance une recherche d’ampleur du véhicule. Ce n’est qu’après plusieurs heures, raconte le Jerusalem Post, qu’un habitant d’un immeuble de la ville signale la présence, dans son parking, d’un 4 x 4 semblable à celui recherché. Il porte de plus des traces de choc à l’avant. Les recherches se précisent, ce véhicule étant enregistré au nom d’un certain Eric Robic, un Français de 38 ans. Mais celui-ci n’est plus là. Il est suspecté, avec son ami Claude Isaac Khayat, un autre Français, âgé lui de 40 ans, d’avoir immédiatement fui Israël, entassant leurs affaires dans des valises et prenant l’avion pour Paris, via Genève.

"Nous avons tué une femme juive"

Dimanche soir, c’est à Paris en effet que la chaîne israélienne Channel 10 News a réussi à joindre Claude Isaac Khayat, qui est le conducteur présumé du véhicule. « Nous avons fait une grosse erreur, a-t-il déclaré au téléphone, mais ce n’était pas volontaire. Je veux que la famille de cette femme sache que c’était un accident. […] Nous voudrions être en Israël, aller voir sa famille et expliquer à quel point nous aussi, nous sommes blessés. Que pouvons-nous faire aujourd’hui ? Nous avons tué une femme juive de 25 ans. Pour nous, c’est la fin du monde. Notre vie est foutue, mais nous ne savons pas quoi faire maintenant. » Pour tenir, dit-il, l’homme se réfugie dans la prière : « Je veux dire à tout Israël… je suis juif. Je prie tous les jours. Mon cœur est blessé. Je ne sais pas pourquoi Dieu m’a laissé faire une chose pareille. »

Depuis près d’une semaine, l’émotion est vive en Israël comme dans la communauté juive de France. Car, pour beaucoup, ces déclarations empreintes de sentiments ne collent pas avec le manque d’humanité des faits tels qu’ils apparaissent : percuter une jeune femme à grande vitesse, la laisser sans soin ni appel aux secours sur la route, et fuir immédiatement vers la France, à l’abri des poursuites de la justice israélienne. Les réactions sont à la fois pleines de douleur et de ressentiment. Une manifestation était hier organisée devant l’ambassade de France à Tel Aviv.

La diplomatie du crime

Car un élément fait encore douter de la sincérité de Claude Isaac Khayat et de son présumé partenaire en fuite. Le lendemain des faits, la femme de Claude Isaac Khayat atterrit à l’aéroport de Tel Aviv, en provenance de France. Elle vient chercher leur fille encore bébé, que son mari a laissé à la charge d’une nourrice avant de filer vers la France. Ce sont les policiers qui l’attendent. Elle dit ignorer l’affaire dont on suspecte son mari. Elle est sommée de téléphoner à son mari, qui répond aux policiers qu’il consultera un avocat avant de décider quoi faire… Un comportement bien éloigné de celui d’un homme rongé par la culpabilité.

C’est désormais à la justice israélienne de régler cette affaire. Si la police affirme « tout faire » pour que les deux hommes reviennent en Israël pour faire face à un tribunal, un obstacle pourrait se mettre en travers de sa route : les usages subtils de la diplomatie. Car pour avoir accès à ces deux fugitifs, la justice devra négocier leur extradition. Un processus qui pourrait être long et difficile. En effet, s’il existe des accords d’extradition entre la France et Israël, la France a pour « usage » de ne pas extrader ses ressortissants. La famille de Lee Zeitouni, ses proches et tous ceux qui de près ou de loin connaissent ce sinistre fait divers ne l’entendent pas de cette oreille.

Extradition, mode d’emploi

« La règle veut qu’on n’extrade pas nos nationaux », déclare-t-on au ministère des Affaires étrangères. Ce qui ne veut pas pour autant dire que les fuyards sont à l’abri des poursuites. Car « la procédure veut que les autorités israéliennes transmettent une commission rogatoire », ajoute-t-on aussitôt. En clair, une description des pièces en possession de la justice désignant les personnes incriminées comme les auteurs des faits, et un certain nombre de questions auxquelles les suspects seront sommés de répondre. A la justice française, ensuite, de répondre à la demande d’extradition. Soit en faisant une entorse au principe général, soit en décidant d’ouvrir une enquête et de juger elle-même les individus mis en cause. « Encore faut-il qu’ils soient domiciliés en France, ce qui n’est pas encore évident… »

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