Daniel Iffla Oisiris, juif et mécène a qui l’on doit plusieurs grandes synagogues
OSIRIS, de son vrai nom Daniel Iffla, est né le 23 juillet 1925, à Bordeaux, dans une famille de modestes commerçants juifs.
Transcription de l’acte de naissance de Daniel Iffla
« Le vingt-cinq juillet mil huit cent vingt cinq à midi, par devant nous, Maire de la ville de Bordeaux, est comparu le sieur Isaac IFFLA, âgé de vingt-cinq ans, commis marchand, demeurant rue Rouhaut n°25, lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin, né avant-hier, au soir, à six heures, de lui déclarant et de Lea CARDOZO D’HOURBINO, âgée de vingt-cinq ans, son épouse ; et auquel il donne le prénom de Daniel. Fait en présence des sieurs Félix LANGE fils, âgé de trente ans, commis négociant, rue Rouhaut n°18 et Isaac IFFLA, cousin de l’enfant, âgé de 22 ans, marchand drapier, fossés de l’hôtel de ville n°11, lecture faite du présent le père et les témoins ont signé avec nous. »
Mention marginale
« Par jugement du dix sept novembre 1863, transcrit le huit décembre suivant sur les registres des actes de naissance, le tribunal de première instance de Bordeaux à ordonné que mention serait faite en marge du présent acte, du décret impérial du 24 août 1861 qui a autorisé le sieur Daniel Iffla, à s’appeler à l’avenir IFFLA OSIRIS. »
1. Daniel IFFLA, le financier
Daniel Iffla fréquente l’école israélite de Bordeaux jusqu’à l’âge de 14 ans. Fasciné par la réussite parisienne de quelques financiers aux racines marranes, comme lui, il décide de « monter » dans la capitale. L’actuel lycée Turgot, créé en 1839, conserve une trace de son passage, dans sa rubrique rétrospective des « turgotins célèbres ». http://lyc-turgot.scola.ac-paris.fr/personnalites.php
Scolarité de courte durée, puisqu’en 1842, à l’âge de 17 ans, Daniel Iffla entame sa vie professionnelle en qualité de grouillot, auprès de l’agent de change Moreau. S’initiant aux règles et subtilités de la Bourse, il intègre très rapidement le cercle fermé des financiers d’origine séfarade (Moïse Milliaud, Jules Mires, Félix Solar, Emile et Isaac Pereire, etc…). Dès lors, son ascension professionnelle et sociale sera fulgurante. Cependant, doté d’un solide bon sens, il conserve en affaires une grande autonomie, s’inspirant de l’expérience de ses pairs sans tomber dans leurs travers - qui en conduiront plus d’un à des opérations risquées ou parfois douteuses, génératrices de scandales et de faillites retentissantes. Daniel Iffla peut être qualifié de financier solitaire. Autodidacte prudent et observateur éclairé, il construira son immense fortune discrètement, par des opérations boursières et des investissements immobiliers, sans créer d’établissements bancaires ou tout autre société ayant pignon sur rue.
Très attaché au judaïsme, bien qu’en perpétuel désaccord avec la hiérarchie religieuse, Daniel Iffla tombe éperdument amoureux d’une jeune fille catholique de riche famille, Léonie CARLIER , qu’il épouse le 24 juin 1854. Ce mariage allogène ne diminue en rien son attachement aux valeurs du judaïsme, mais amplifie considérablement les difficiles relations et l’incompréhension qu’il entretient déjà avec les autorités juives de l’époque.
Quinze mois plus tard, son épouse Léonie meurt ainsi que les deux enfants qu’elle venait de mettre au monde. C’est le drame absolu de la vie de Daniel Iffla qui ne se remariera jamais et conservera intacte, sa vie durant, la chambre de son épouse, lui vouant un véritable culte. Ce tragique évènement, probable déclencheur d’une nouvelle philosophie de vie, s’inscrira désormais en filigrane dans tout le futur de Daniel Iffla.
L’indifférence manifestée par les tenants des institutions religieuses lors de son deuil cruel est pour lui une seconde épreuve dont il gardera un fort ressentiment.
On ne sait que peu de choses concernant les relations de Daniel avec le reste de sa famille, ses frères et sœurs en particulier, probablement parce que ces relations étaient réduites au strict minimum. Dans son testament, Daniel reproche à ses frères d’avoir contrecarré un projet qui lui tenait à coeur, sans préciser lequel : « une grande faute commise, sans qu’il leur en coûtât un sou ». De plus, Daniel Iffla n’apprécie guère la vie parisienne et tumultueuse de ses nièces, dont l’une épousa le compositeur Claude Debussy et l’autre fut l’une des nombreuses épouses du comédien Sacha Guitry.
Dès 1860, fortune faite (en partie avec la dot de son épouse diront les envieux), Daniel Iffla prend ses distances avec le palais Brogniart et le monde financier, leur préférant les milieux artistiques, littéraires et scientifiques.
C’est également à cette époque que pour des motifs demeurés énigmatiques, il décide d’accoler à son patronyme, le nom d’OSIRIS, grâce qui lui fut accordée par décret impérial du 24 août 1861.
Certains biographes pensent pouvoir affirmer que la mère de Daniel (Léa Cardozo) aurait fait vœu de surnommer ainsi l’un de ses enfants, en souvenir d’un frère embarqué dangereusement sur un navire du nom d’Osiris. Daniel aurait ainsi honoré la mémoire de sa mère.
Réalité ou légende ? L’explication paraît quelque peu alambiquée. Pour notre part, nous avançons l’hypothèse que cette modification d’identité, intervenant à une période charnière de la vie de Daniel Iffla, est en fait un émouvant et symbolique hommage rendu à son épouse Léonie. En effet, dans la mythologie égyptienne, Osiris, ramené à la vie par son épouse Isis, est à la fois le symbole d’une vie nouvelle et le garant de la survie des défunts dans l’au-delà. Léonie identifiée à Isis suggère cette nouvelle vie à Daniel, lequel, paré des attributs d’Osiris, veille sur son âme et sur celle de ses enfants.
2. OSIRIS, le fidèle bienfaiteur
Très rapidement le patronyme d’IFFLA ou d’IFFLA-OSIRIS, fera place à celui d’OSIRIS tout court, raillé par les antisémites (Drumont en tête) qui voient là une manœuvre destinée à dissimuler ses origines juives. Sa fortune est estimée , au minimum, à 50 millions de francs soit l’équivalent d’environ 200 millions d’euros. Le chiffre crédible et probablement en deçà de la réalité, lui procure un revenu annuel estimé à plus de deux millions de francs (environ 7 millions d’euros).
Ses contemporains le décrivent parfois comme étant « pingre », ce qui constitue une grossière erreur d’appréciation. C’est un homme qui par ses origines modestes, connaît la valeur de l’argent et ne l’utilise qu’à bon escient. Il vit simplement dans son hôtel particulier de la rue de La Bruyère, refusant un temps l’installation de l’électricité jugée trop coûteuse. On le rencontre parfois dans les petits restaurants de quartier, mais jamais dans les établissements de grand renom.
Il est exact qu’il pratiquait le culte de la personnalité, chacune de ses réalisations les plus spectaculaires portant, selon son exigence, sa signature très apparente.
Mais qui était vraiment cet homme hors du commun ? Patriote juif ou nationaliste forcené ?
Juif de cour ou philanthrope désintéressé ? Génial mécène ou risible mégalomane ?
La personnalité de cet individualiste est difficile à cerner. Il se dégage cependant de son action multiple, une indéniable qualité : LA FIDÉLITÉ.
Fidélité à ses origines modestes et à sa judaïcité, fidélité à la République française, fidélité à sa région natale et, enfin, fidélité à sa défunte épouse. Il n’existe aucune hiérarchie entre ces différentes valeurs qu’il place d’emblée sur le même plan et qui se retrouvent bien souvent étroitement mêlées dans ses choix.
Il serait vain de tenter de dresser une liste exhaustive de ses innombrables bienfaits, qui s’accélèreront au cours du temps, pour atteindre leur paroxysme avec ses volontés testamentaires. Certains bienfaits seront réalisés avec éclat, d’autres - aussi nombreux - dans la plus grande discrétion.
Ceux que nous rappelons, ci-après, nous paraissent les plus représentatifs de la complexité du personnage et des valeurs auxquelles il est attaché.
Fidélité à la République
Osiris, de tous temps, voue une admiration sans bornes, aux personnages célèbres de l’histoire de France. Cette passion qui confine parfois à l’idôlatrerie est exacerbée par un goût immodéré pour la sculpture et la statuaire.
1870 - Dans son hôtel parisien, Osiris possède l’une des plus belles collections de souvenirs napoléoniens. Avec Jeanne d’Arc, le premier consul figure en-tête de ses héros de prédilection. Par la suite, il fera ériger à Waterloo, sur un vaste terrain qu’il avait acquis face à « La Butte du Lion », un mémorial « L’Aigle blessé », à la gloire des grenadiers de la garde impériale. Cette attention n’est pas sans rapport avec le souvenir de son grand-père, dont il porte le prénom (Daniel Iffla °1769), qui fut un fidèle lieutenant de Bonaparte et qui se distingua aux sièges de Toulon et du Boulou.
1889 - N’ayant pu acquérir la maison natale de Jeanne d’Arc à Domrémy (le clergé s’y étant opposé), il commande au sculpteur Emmanuel Frémiet, deux statues équestres de « La Pucelle ». La première est érigée en 1889, place des pyramides à Paris, la seconde est offerte à la ville de Nancy en 1890. Le choix de la ville de Nancy n’est pas innocent, Osiris voulait ainsi, aux portes de l’Alsace Lorraine annexée, exprimer son profond patriotisme, mais aussi sa solidarité avec les juifs ashkénazes tenus sous le joug prussien.
1889 - Osiris crée très officiellement, à l’occasion de l’exposition universelle, un prix de 100 000 francs (350 000 euros) destiné à récompenser une action publique remarquable. Parmi les lauréats désignés par un jury de journalistes dans les années qui suivirent, citons Louis Blériot, le maréchal Lyautey ou encore le docteur Roux de l’Institut Pasteur. La coïncidence de l’évènement avec le centenaire de l’émancipation des juifs sépharades, ne doit assurément rien au hasard, comme le confirmera Osiris lui-même.
1896 - Osiris se porte acquéreur du château de Malmaison, durement endommagé, mais convoité par un richissime Anglais. Aux yeux d’Osiris, la demeure de Napoléon et de Joséphine, ne peut et ne doit pas quitter le patrimoine national. Il y entreprend une restauration gigantesque et rachète partout où il le peut, les meubles authentiques, que l’action du temps avait dispersés.
Son œuvre achevée, Osiris offrira cette perle ressuscitée à l’Etat français.
1902 - Il offre à la ville de Lausanne, une magnifique statue de Guillaume Tell, en remerciement, précise-t-il, du refuge accordé, en 1871, par la Suisse, à l’armée française du général Bourbaki, en pleine déroute. L’œuvre est réalisée par son ami sculpteur : Antonin Mercié. Par testament, Osiris fera plusieurs legs à la ville de Lausanne, en particulier les fonds nécessaires à la construction d’une chapelle dédiée à Guillaume Tell et la somme de 50 000 francs (160 000 euros) destinée à la communauté juive de la ville qui envisage la construction d’une synagogue.
Fidélité au judaïsme
L’animosité d’Osiris envers les institutions juives n’affecte en rien son attachement aux valeurs du judaïsme. Adorateur des « illustres enfants d’Israël » - comme il aime à le rappeler et à le faire graver dans le marbre de ses réalisations - ses préférences englobent tout à la fois les patriarches bibliques, Moïse en tête, mais aussi des personnages aussi divers que Rachi, Adolphe Crémieux, des rabbins prestigieux tel Jacob Athias ou encore la tragédienne Rachel. Son panthéon confessionnel est logiquement à forte imprégnation sépharade. Ainsi lorsqu’il honore les « grands citoyens français, défenseurs du judaïsme », Mirabeau ou l’abbé Grégoire, fait-il référence à la séance de l’Assemblée nationale du 28 janvier 1790 qui émancipa les juifs du sud de la France, alors que les juifs ashkénazes durent patienter jusqu’au 28 septembre 1791.
Sa contribution aux valeurs du judaïsme se traduit exclusivement par des initiatives personnelles, et sciemment, en dehors de toute concertation avec les instances religieuses adéquates….
Financier-bâtisseur de synagogues, dans chacune d’entre-elles, il impose comme préalable, que son nom figure ostensiblement en bonne place et que soient honorés son panthéon personnel ou ses amis banquiers (Solar, Péreire, etc..).
Au minimum, huit synagogues, sont le résultat de la volonté d’ Osiris, de son vivant ou par legs posthumes :
- synagogue d’ Arcachon,
- synagogue de Bordeaux (en partie).
- synagogue de Bruyères,
- synagogue de Lausanne,
- synagogue de Tours,
- synagogue de Tunis,
- synagogue de Vincennes,
- synagogue de la rue Buffault, à Paris.
1873 - La synagogue de Bordeaux est anéantie par un incendie. Osiris propose d’en financer la reconstruction estimée à 700 000 francs (plus de 2 millions d’euros), mais les conditions qu’il y attache et que l’on devine (multiples plaques à son nom et à la gloire de ses idoles…), posent problème et le brouillent définitivement avec le consistoire régional. Il participera cependant au financement de l’édifice, aux côtés des frères Pereire et de la famille de Rothschild.
1874 - Le consistoire israélite de Paris achève la construction de la synagogue de la rue de la Victoire, dans l’espoir qu’elle puisse fusionner les rites sépharade et ashkénaze. Osiris l’indépendant, qui refuse l’allégeance au consistoire, constitue avec ses amis marranes, une société civile dont l’objectif est la construction de la synagogue de la rue Buffault. Principal pourvoyeur de fonds à hauteur de 200 000 francs (environ 700 000 euros), Osiris impose son architecte et ses conditions : une plaque extérieure à son nom, une plaque intérieure avec ses héros, parents et amis. Pour obtenir satisfaction face à ses partenaires, opposés à ces exigences, il n’hésite pas à intenter un procès qui lui donnera gain de cause. La synagogue est inaugurée en septembre 1877.
Cependant, la brouille occasionnée l’incitera à poursuivre sa générosité confessionnelle en dehors de la capitale.
1903 - Le cas de la synagogue de Bruyères, à l’origine de notre enquête, est représentative de l’état d’esprit de son mécène.
La petite communauté juive de Bruyères, composée essentiellement de juifs alsaciens comprend, en cette fin du 19e siècle, une centaine de personnes.
Depuis des années, ses membres avaient pour projet l’établissement d’un lieu de culte digne de ce nom et économisaient à cette fin. Le devis d’un architecte local pour une construction a minima, se montait à 10 000 francs, une somme sans commune mesure avec les 200 francs réunis à grand’ peine.
C’est alors que Moïse Schuhl, grand rabbin des Vosges et de Haute-Saône eût l’heureuse idée de prendre contact avec Osiris dont la générosité et les actions isolées, étaient devenues légendaires.
Osiris, qui probablement ignorait jusqu’à l’existence de la ville de Bruyères, séduit par l’acharnement de cette petite communauté à vouloir bâtir son propre temple et peut-être aussi par le fait que tous ces alsaciens avaient fuit la province annexée, se laissa convaincre par les arguments du rabbin.
Comme pour les autres synagogues qu’il fait ériger, il impose son architecte, ses plans et ses conditions habituelles (plaques à son nom et à la gloire de ses héros). Le coût de l’opération, d’un montant de 15 000 francs, n’a rien de comparable avec celui de la rue Buffault.
Fidélité à Bordeaux
1860 - Osiris rachète à Bommes (33210) le prestigieux domaine de « La Tour Blanche », grand vin de Sauternes, concurrent du fameux « Château Yquem ». L’immense domaine viticole de 65 hectares, symbole de la culture française et bordelaise, menaçait de tomber en des mains étrangères, perspective qui lui est insupportable. Il faut également remarquer que financiers sépharades et ashkénazes qui constituent deux entités « économico-judaïques » distinctes, se livrent à d’aimables joutes, en matière d’acquisitions et de mécénat. Sous le second empire, plus que jamais, un juif aisé, fut-il français depuis des lustres, doit affirmer et même prouver aux yeux de la collectivité, son intégration et son attachement aux valeurs communes. Osiris, le gamin de Bordeaux, l’ex petit grouillot de chez Moreau, devient par cette acquisition, dans le vignoble de son enfance, l’égal de la puissante dynastie des Rothschild qui avait elle-même investit dans plusieurs crus célèbres de la région. Lui, qui ne consomme que très peu de vin, se passionne pour ce domaine, faisant appel à Louis Pasteur pour en améliorer la vinification et mieux appréhender les subtilités du rôle des micro-organismes.
A sa mort, Osiris lègue la totalité du vaste domaine à l’Etat, sous condition que celui-ci y crée une école « populaire et gratuite » de viticulture et de vinification, ce qui fut fait.
1873 - En 1870, au sortir du siège de Paris, l’alimentation en eau potable fait défaut dans la capitale, à tel point qu’il parait plus aisé de se procurer du vin. C’est alors qu’un riche et généreux anglais, sir Richard Wallace offre à la ville de Paris, 50 fontaines publiques monumentales. L’idée de cette eau à la discrétion des plus humbles séduit Osiris qui commande six fontaines pour la ville de Bordeaux. Il y joint une condition : que l’une de ces fontaines soit installée place du général Sérail, quartier qui l’a vu naître. Au cours de la dernière guerre, trois de ces fontaines, véritables œuvres d’art, ont disparu, probablement volées par l’occupant. A la fin de l’année 2003, une âpre polémique éclata entre le maire Alain Juppé qui fit déplacer la fontaine de la place du général Sérail et Richard Zéboulon, membre la communauté juive de Bordeaux qui entendait faire respecter le vœu et la mémoire de l’illustre bordelais. L’entêté Richard Zéboulon, non sans difficultés, obtint finalement gain de cause.
1907 - Par testament, Osiris lègue à la ville de Bordeaux, la somme de deux millions de francs (7 millions d’euros), afin que soit créé un bateau-asile amarré sur la Gironde et destiné à recevoir les indigents de la ville. « Le bateau-soupe » amarré quai Sainte Croix et baptisé « Osiris » selon le vœu du généreux donateur, fonctionnera de 1912 à 1940. Malades, chômeurs, infirmes, femmes enceintes et orphelins recevront plus de 14 000 repas et collations par mois, ainsi qu’un soutien médical dont l’impact positif sur la mortalité infantile fut incontestable. Réquisitionné par le commandement allemand pour y installé une batterie de DCA, « l’Osiris » sera sabordé et sombrera dans la Gironde en 1944.
Fidélité au souvenir de son épouse
Osiris soutient de nombreuses œuvres destinées à venir en aide aux femmes, aux femmes enceintes plus particulièrement, ainsi qu’aux orphelins.
A Paris, il finance à l’hôpital de la Salpétrière, deux pavillons destinés aux femmes. Il apporte également son concours à de multiples œuvres dont la Société d’Allaitement maternel, l’Ouvroir pour femmes enceintes, la Protection de l’Enfance et l’Orphelinat de Belleville.
A Nancy, il est à l’origine de la crèche municipale et de l’Institut de Sérothérapie.
Volonté posthume, c’est également en hommage aux épouses « raisonnables », comme l’eut sans doute été Léonie et par opposition à ses nièces dispendieuses, qu’il lègue à la ville de Paris, la somme nécessaire à l édification d’ un monument à la gloire de deux veuves charitables : madame Boucicaut et la baronne de Hirsch, qui avaient en commun d’avoir offert à la science et à l’institut Pasteur, en particulier, des sommes considérables.
Plus modestes et discrets, sont les cours de sténodactylographie qu’il fait dispenser aux veuves et aux orphelines.
Fidélité à ses origines modestes
1860 - L’une des premières contributions d’Osiris est destinée à venir en aide aux miséreux. Dans la plus grande discrétion, il apporte son concours financier au « Pain pour tous », œuvre qui distribue des repas aux plus démunis, dans les différents quartiers de Paris.
C’est aussi lui, précurseur de génie, qui invente le « micro-prêt d’argent », sans intérêt, dont les bénéficiaires seront les marchands des quatre saisons et autres petits commerçants et artisans des rues de la capitale. Le prêt de 50 francs (160 euros) est remboursable après vente, pour être à nouveau recyclé. 200 prêts sont ainsi consentis en permanence.
3. Le testament d’OSIRIS
Daniel Iffla, plus connu sous le nom d’Osiris, s’éteint à Paris le 4 février 1907, solitaire, comme il avait presque toujours vécu. Malgré une vie consacrée au mécénat, sa fortune est encore immense, certaines de ses acquisitions, comme le domaine de « La Tour Blanche » ou des villas à Arcachon, s’étant révélées avec le temps, d’astucieux placements.
Depuis des années, il peaufinait son testament, document impressionnant de plusieurs dizaines de pages.
Nous ne reviendrons pas sur les legs cités précédemment, tels le bateau « Osiris », le domaine de « La Tour Blanche » ou la chapelle de Guillaume Tell.
Quelques legs mineurs sont dévolus à sa famille, qui intentera un procès au légataire universel.
Des dons substantiels vont à des œuvres humanitaires ou de bienfaisance, aussi variées que l’Orphelinat des Hôpitaux marins ou la Société de Protection des Engagés volontaires.
Osiris lègue une rente perpétuelle aux villes d’Arcachon, Berne, Bordeaux, Genève, Lausanne, Lyon, Marseille, et Nancy. Selon sa volonté, cette rente annuelle de 1 000 francs, est destinée à récompenser les élèves des écoles communales, les plus dignes et les plus méritants, sans distinction de culte.
Pour l’essentiel de sa fortune, il désigne l’Institut Pasteur légataire universel et exécuteur testamentaire :
« Ayant toujours eu l’ardent désir de favoriser les découvertes scientifiques qui peuvent contribuer au soulagement de l’humanité, je place mon legs universel et son exécution sous l’invocation de la mémoire du grand Pasteur, une des gloires les plus belles de mon pays ».
S’acquittant scrupuleusement de ses obligations testamentaires et morales, en particulier d’une promesse faite de son vivant par Osiris à la communauté de Tunis, l’Institut Pasteur finance la synagogue de cette ville et se retrouve néanmoins à la tête d’un « trésor » de près de 40 millions de francs (130 millions d’euros).
Le legs « Osiris » constitue, encore aujourd’hui, le legs le plus important jamais reçu par l’Institut. Selon l’avis des spécialistes, il intervenait à un moment crucial de son histoire, lui donnant les moyens de sa pérennité et de son développement. C’est aussi, grâce à ce legs opportun, que fut créé, en 1908, l’Institut du Radium de Marie Curie, dont les découvertes ont révolutionné la science moderne.
Le dernier « coup » d’Osiris
OSIRIS repose au cimetière Montmartre. Fidèle à ses valeurs, sa tombe est ornée d’une imposante statue de Moïse, œuvre de son sculpteur fétiche Antonin Mercié et reproduction du chef d’œuvre de Michel-Ange. Ce n’est pas par hasard que ce caveau monumental se dresse en limite des parcelles chrétiennes et israélites. En effet, à quelques pas de là, se trouve la tombe de Léonie Carlier, amour indéfectible au-delà de la mort. Jadis, un mur séparait les deux parcelles, mais la volonté, l’intelligence et… l’argent, ont eu raison de cette muraille.
Vous qui passez par là, n’oubliez pas de saluer ISIS, la malheureuse, et OSIRIS, le gamin de Bordeaux…
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